Ajustement structurel : Pourquoi le FMI tarde-t-il à signer un nouvel accord de prêt avec le Gabon ?

Par Dess BOMBE / 30 mar 2021 / 0 commentaire(s)
willy Ontsia.

Les prêts accordés par le Fonds monétaire international (FMI) aux Etats comme le Gabon sont des financements conditionnés et ciblés, c’est-à-dire qu’ils sont adossés à un programme triennal subordonné à la réalisation de réformes structurelles censées, notamment, améliorer l’efficacité économique, optimiser les recettes budgétaires, maîtriser les dépenses publiques, consolider les prestations sociales, pour préserver les grands équilibres macroéconomiques et sectoriels.

C’est, notamment, pour cette raison que les prêts du FMI sont « décaissés de manière séquentielle », c’est-à-dire que le déblocage des fonds se fait par tranche versée selon l’état d’avancement des réformes à réaliser par le pays emprunteur. Pour suivre l’exécution des réformes affectées au prêt, le FMI procède à des « revues semestrielles » dans le pays emprunteur, pour s’assurer de la bonne application des mesures corrélées aux conditions de crédit.

Il s’avère que, concernant l’ancien programme 2017-2020 d’un prêt d’un montant de 642 millions dollar US (358 milliards Fcfa), le Gabon n’a pas tenu la totalité des engagements pris auprès du FMI, notamment en matière de réformes visant plus de transparence et de bonne gouvernance financière de l’Etat, mais également en ce qui concerne la soutenabilité de la dette publique ou la bonne exécution des programmes sociaux.

Pour illustrer les violations de certaines conditions de l’accord de prêt signé avec le FMI dans le cadre de l’ancien programme 2017-2020, on relève, par exemple, le fait qu’un ancien ministre de l’Economie accordait des milliards de francs d’annulations et dégrèvements fiscaux à des opérateurs privés. Ce qui était totalement contraire à l’objectif d’optimisation des recettes budgétaires pris par le Gabon auprès du FMI.

Par ailleurs, s’agissant de la dette publique, le Gabon s’était engagé à maîtriser son endettement en dessous de 70 % du Produit intérieur brut (PIB). Mais malheureusement, le pays a brûlé le feu rouge, etc.

Pour toutes ces raisons, le FMI a des récriminations à l’encontre du Gabon dont la sphère politico-économique est jugée peu respectueuse de l’orthodoxie financière et qui met en péril la viabilité de l’Etat, et oblige l’institution de Bretton-Woods à intervenir en prêteur en dernier ressort, pour éviter au pays la banqueroute, notamment en termes d’accumulation des arriérés de la dette extérieure.

En sus, il faut noter que le Gabon tente d’allonger les chiffres pour obtenir un soutien financier plus élevé que celui estimé par le FMI. Donc, les discussions entre le FMI et le Gabon achoppent également sur le chiffrage du cadrage macroéconomique et budgétaire qui déterminera le niveau de financement global accordé au Gabon par cette institution financière internationale.

Voulant redorer son blason car, très critiqué pour la faible efficience des plans d’ajustement structurel, le FMI est de plus en plus exigeant avec les Etats africains qui sollicitent son aide, mais n’appliquent pas toutes les recommandations contractuelles liées aux conditions de prêt. C’est dans cette optique que le FMI a décidé de corser les discussions avec le Gabon en relevant le niveau de ses exigences vis-à-vis de notre pays. Ceci pour promouvoir des réformes crédibles et s’assurer qu’elles soient acceptées et rigoureusement mises en œuvre par la suite.

En définitive, il faut retenir que le FMI est disposé à signer un nouveau programme d’ajustement structurel avec le Gabon. Mais l’institution de Bretton-Woods veut se rassurer que pour ce nouveau prêt, le Gabon atteindra les objectifs assignés en termes d’assainissement budgétaire, de non-accumulation des arriérés extérieurs, de diversification de l’économie réelle, d’optimisation des recettes non-pétrolières, de gel des dégrèvements fiscaux, de limitation des dépenses extrabudgétaires, de développement du secteur privé, d’inclusion financière ou d’amélioration du climat des affaires.

Par conséquent, les négociations se poursuivent entre le Gabon et le FMI pour la signature d’un accord de prêt dont le déblocage de la première tranche pourrait intervenir avant la fin du premier semestre de l’année en cours.

*Expert-financier 

 Willy Ontsia

Article du 30 mars 2021 - 10:20am
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