Gabon : Le gouvernement est-il au-dessus de la loi ?

Par Nicolas NDONG ESSONO / 31 mai 2021 / 0 commentaire(s)
Comme les gouvernés, les gouvernants sont tenus de respecter les lois et les règlements en vigueur.

Le déploiement des forces de l’ordre pour empêcher une assemblée générale régulière et la façon dont le gouvernement se comporte face à une décision de la Cour constitutionnelle inclinent à se demander si les pouvoirs publics sont dispensés du respect de leurs propres lois et du fonctionnement des institutions. Qu’en est-il du devoir d’exemplarité ?

« Nous avions voulu que cette assemblée générale se tienne dans un lieu privé. Elle se tient maintenant sur un lieu public par la volonté des policiers », s’est plaint Jean Rémy Yama, le président Dynamique unitaire (DU), à l’entame de l’assemblée générale de la centrale syndicale ce 29 mai à Libreville. Et pourtant ce rassemblement prévu de longue date avait été signalé au ministère de l’Intérieur, la tutelle des Forces de police nationale.

L’intervention de la police a même causé une situation cocasse. Au lieu qu’elle se tienne dans l’espace clos prévu, en l’occurrence le terrain de basket d’Awendjé, où DU a l’habitude d’organiser ses rassemblements, l’assemblée générale s’est déroulée sur la voie publique, non sans provoquer des désagréments pour les riverains en termes de mobilité.

De plus, le terrain de basket d’Awendjé est un lieu privé. La police a-t-elle le droit d’empêcher une réunion dans une propriété privée sans que la réunion en question ne représente un danger pour la société ? N’est-on pas là face à un cas flagrant d’abus d’autorité ? Certes, la police semble se rendre coutumière du fait, mais doit-on fermer les yeux ?

Les usages veulent que l’exemple vienne d’en haut. Or, dans le règlement des problèmes que DU lui soumet, le gouvernement a adopté une attitude assimilable à la désinvolture quant à un arrêt de la Cour constitutionnelle, dont il sait pourtant que les décisions sont sans appel et à exécuter immédiatement. En effet, jusqu’à la fin de son programme de relance économique avec le Fonds monétaire international (FMI), le gouvernement appliquait les mesures d’austérité que l’institution financière lui avait exigées, alors que la Cour constitutionnelle, dans un arrêt daté du 30 octobre 2018, lui avait enjoint d’annuler lesdites mesures.

Il s’agissait du gel des recrutements, des intégrations, des avancements, des reclassements et du paiement des dettes envers les agents publics. Depuis la fin du programme avec le FMI, le gouvernement a rouvert les dossiers des fonctionnaires. Mais pas à un rythme satisfaisant, aux yeux de DU et des autres centrales syndicales.

Si les gouvernants sont les premiers à ignorer les injonctions de la Cour constitutionnelle, seront-ils encore fondés à exiger des gouvernés la déférence qu’ils doivent à la Haute juridiction ? Il en est de même du respect des mesures restrictives dans la lutte contre la pandémie de la Covid 19. Des ministres ont organisé des rassemblements au plus fort de la crise sanitaire, alors que le gouvernement maintenait les lieux de culte fermés. Il s’était ensuivi une grogne de la Conférence épiscopale, qui avait décidé d’ouvrir les églises catholiques de sa propre initiative.

Il est donc à craindre un affaiblissement de l’autorité de l’Etat, si les gouvernants persistent dans la violation de la loi. Nul n’est censé ignorer la loi et nul n’est au-dessus de la loi.

 

Brandy MAMBOUNDOU

Article du 31 mai 2021 - 11:25am
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