Gabon/Après le référendum 2024: C’est désormais le feu chez les Maganga Moussavou
Le deuxième référendum post-indépendance du Gabon a eu lieu le 16 novembre dernier. La campagne pour cette consultation politique a démontré un clivage entre les tenants du « Oui » et ceux du « Non ». Depuis la fin du scrutin, remporté par le « Oui », le feu qui couvait sous les cendres est sur le point d’exploser certaines familles dont celle de Maganga Moussavou.
Même si le président de la Transition, le général Brice Clotaire Oligui Nguema, avait déclaré, à la veille du lancement de la campagne référendaire, que ce scrutin ne devrait pas être une source de division entre les Gabonais, les vieux démons de l’antagonisme ont refait surface. Et aujourd’hui, ce sont les membres de la « famille la plus politisée » du Gabon, qui sont à couteaux tirés. Les réseaux sociaux, depuis près d’une semaine, ne bruissent que des pamphlets entre l’ancien Vice-président de la République, Pierre-Claver Maganga Moussavou et son épouse, Albertine, vice-présidente de l’Assemblée nationale. Comment en est-on arrivé à cette belligérance inter-familiale ?
Pour la campagne référendaire qui s’est déroulée du 6 au 15 novembre 2024, le camp du « Oui », amené par le gouvernement, avait mis en place, avec l’appui des institutions républicaines, dont l’Assemblée nationale, le Sénat et toutes les autres administrations, une coordination nationale, avec des sous-coordinations dans les chefs-lieux de province et des départements. La Vice-présidente de l’Assemblée nationale, Albertine Maganga Moussavou, comme beaucoup d’autres de ses collègues, s’est trouvée embarquée dans cette dynamique de campagne. Elle avait été chargée de la coordination de la Douya-Onoye (Mouila), fief politique de la famille Maganga Moussavou.
Au moment même où le chef de famille, le président du Parti social-démocrate (PSD), battait campagne pour le « Non », son épouse et secrétaire générale du parti était donc dans le camp du « Oui ». Une situation inédite depuis la création de cette formation politique, qui a été constante dans le combat démocratique depuis trente-quatre ans avec, bien sûr, des hauts et des bas.
Le PSD, pour le temps de la campagne référendaire, est ainsi devenu un monstre à deux têtes. On pourrait même ajouter une troisième tête, celle de Biendi Maganga Moussavou, le fils ainé du couple, qui appelait de son côté la population de Mouila à voter « Oui » pour la nouvelle constitution.
Sollicitation d’une ordonnance de protection
La situation s’est envenimée depuis la publication des résultats, par le ministre de l’Intérieur et leur transfert à la Cour constitutionnel pour leur validation officielle. Dans un texto publié, le 21 novembre sur les réseaux sociaux, qui émanerait du parquet de Libreville, Albertine Maganga Moussavou aurait sollicité une protection rapprochée des forces de sécurité.
Un greffier aurait saisi le procureur de la République en ces termes : « Respects M. le Procureur. Ce mardi 21 novembre 2024, alors que vous étiez au ministère de la Justice, avons reçu Mme Maganga Moussavou. Cette dernière, député de la transition et troisième vice-présidente de l'Assemblée nationale de la transition, nous a expliqué vouloir bénéficier d'une ordonnance de protection. Elle dit que suite a un désaccord politique avec son époux, ce dernier est devenu violent envers elle. Qu'à chaque prise de parole publique, il la traite de traîtresse et l'insulte. Pis, il dit que là où il va la voir, le sang va couler. Ne se sentant plus en sécurité, elle n'avait d'autre choix que de saisir le juge de la protection. Après l'avoir écouté, le vice-président lui a délivré une ordonnance portant autorisation d'assigner. L'avons mise en contact avec un huissier de justice. Audience de protection prévue pour le vendredi 22 Novembre 2024 à 11h .»
Le volcan serait donc entré en ébullition dans la famille Maganga Moussavou. En effet, comme il fallait s’y attendre, le président du PSD n’est guère homme à se taire face à de telles accusations, même émanant de sa douce épouse. Et, comme disent les Espagnols, « on n’abandonne jamais la route pour le raccourci », la réponse du berger à la bergère (au sens figuré comme au sens propre) ne s’est pas fait attendre.
Bagarre de chiffonniers entre le couple le plus emblématique de la République
Le bouvier de Moutassou a aussitôt couché une épitre qu’il a publiée, via les mêmes canaux de communication : « Albertine, n'oublie jamais que toute accusation sur toute forme de violence doit être sous tendue par un constat d'huissier sans lequel les propos contre moi, ton époux, sont diffamatoires. Le jour de ton départ, je t'ai cherché pour apprendre que tu étais partie sur Mouila, sans me dire au-revoir. Tu as quitté le domaine familial de Mouila de ton propre gré. Par ailleurs, de nous deux, tu es la seule à posséder les clés de la maison principale de notre domaine de Moukoumounabouala. De retour sur Libreville, sans que rien, ni personne ne t'a empêchée de réjoindre ton domicile conjugal, tu as décidé d'aller vivre hors de ton foyer. Tu parles de violence et de peur, tout cela ma chérie, se passe dans ta tête, car tu sais mieux que quiconque que tout au long de notre vie commune, je n’ai jamais exercé la moindre violence sur ta personne. Tes gesticulations pour justifier ton abandon de foyer n'aboutiront qu’à te ridiculiser, comme c'est le cas à partir d'une missive administrative qui aurait dû rester confidentielle. Et voilà que tout le monde est informé qu'une grande dame comme toi a choisi de diffamer le père de ses enfants pour qu’on s'apitoie sur la vie que toi-même a choisie de mener, hors de toutes les convenances. »
Qui pouvait croire que les Gabonais seraient amenés à assister un jour à cette bagarre de chiffonniers entre le couple que l’on croyait un des plus dynamiques et emblématique de la République ?
Certes, comme disaient nos ancêtres, « la vie n’est pas un problème à résoudre, mais une réalité dont il faut faire l’expérience ». Pour que les Gabonais continuent à croire à « la vie de château » que la famille Maganga Moussavou a su faire miroiter, jusqu’à ce jour, les autorités de la République ont le devoir d’intervenir rapidement pour éteindre l’incendie qui risque de ravager, pas seulement une famille, mais aussi l’intelligentsia nationale, qui était jusqu’ici représentée par les Maganga Moussavou.
Sinon, d’aucuns diront que le référendum a été finalement une source d’éclatement des familles gabonaises.
Elzo Mvoula
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