Jeudi dernier, au cours d’une sortie inattendue de l'Imam Mahmoud Dicko, il a traité les gouvernants de la transition de « arrogants » et la communauté internationale « d’orgueilleuse » au grand étonnement des personnalités présentes. Depuis lors, dans les salons feutrés et dans la rue, le sujet est sur toutes les lèvres.

Après des mois d’absence, l’imam de Badalabougou est revenu sur la scène politique en pilonnant sur tout le monde : autorités de la Transition, Communauté internationale, classe politique et société civile locale. A ses yeux, personne ne trouve grâce. Même si les Maliens, dans leur majorité, sont satisfaits de la tournure actuelle des évènements dans leur pays ; lui, Dicko ne l’est pas. Alors là, pas du tout !

Imam Mahmoud Diicko

Signe des temps, lors du Forum de Bamako la semaine dernière, l'Imam Mahmoud Dicko n’y est pas allé avec le dos de la cuillère. D’une voix calme, avec un timbre haut, très sûr de son constat, il a déclaré : « Le peuple malien est pris en otage par des gouvernants arrogants, je dis bien arrogants et la communauté internationale par leur orgueil pense qu’on doit rester dans cette situation, mourir à petit feu, assaillis par la famine, par l’insécurité, par le djihadisme qu’on n’arrive pas à contrôler. On ne cherche pas une solution. La communauté internationale est dans son orgueil. Nous, nous sommes dans notre arrogance et le peuple est en train de mourir. »

Battre en brèche les propos de l’Imam Mahmoud Dicko

Chérif Bouyé Haidara

Du coup, il n’en fallait pas plus pour susciter des réactions diverses et variées. Du côté des religieux, le chérif de Nioro a été le premier à battre en brèche les propos de l’Imam Mahmoud Dicko. Lors de son sermon, le vendredi dernier, il a dit que les autorités maliennes ne sont pas arrogantes. Pour lui, les gouvernants maliens n’ont fait que laver et préserver l’honneur du Mali. « Partout dans le monde, a-t-il clamé d’une voix rassurante, les dirigeants se font toujours respecter à travers les pouvoirs qu’ils détiennent. Aucun pays n’aime être humilié ou vilipendé par une autre puissance quelconque, quelle que soit la richesse ou la diplomatie de cette dernière », a déclaré le chérif de Nioro. Avant d’asséner : « Nous avons été humiliés aux yeux du monde entier à travers nos propres dirigeants. Aujourd’hui, notre pays connaît un régime militaire qui donne un nouvel élan et une nouvelle dignité à son peuple ».

Seydou Traoré

Dans le microcosme politique, l’ancien ministre et cadre de l’Adema, Seydou Traoré a, lui aussi, répliqué à la prise de position de l’imam Dicko. Selon Traoré, l’imam Mahmoud Dicko est « inconstant » et « ambigu ». « L’imam Dicko, vénéré et respectable patriarche religieux, votre discours au Forum de Bamako a juste montré que vous êtes un humain parmi les humains, inconstant comme les humains savent l’être, ambigu comme n’importe quel mortel », a-t-il déclaré. En contraste avec Dicko, cet ancien ministre trouve que les autorités travaillent à donner au Mali sa dignité et sa souveraineté. « Alors, quoi de plus normal que dans cet éclairage, face à une situation d’atteinte caractérisée à notre souveraineté que les autorités de la Transition soient intransigeantes et arrogantes pour répondre à l’orgueil de la communauté internationale qui se croit et se prend « propriétaire » du Mali », a précisé Seydou Traoré. Pas que !

Mahmoud Dicko a manqué du respect au peuple malien

L’ancien ministre a estimé que l’imam Mahmoud Dicko a manqué du respect au peuple malien. « Par contre, à charge pour vous de vous excusez publiquement, car nous sommes nombreux à nous sentir insultés par vos propos », a-t-il martelé ; avant d’ajouter : « Iman Dicko, comme Macron, Florence Parly, Jean Yves Le Drian, le sénateur français Christian Cambon, président de la Commission des Affaires Étrangères et de la défense, vous nous avez manqué de respect. Vous avez déçu ! LA FRANCE DE MACRON JUBILE ! » Yankoro Jeah Samaké, président du parti pour l’Action Civique Patriotique a déclaré : « Nous ne pouvons être en désaccords avec ce que le vénéré Imam Mahmoud Dicko dit, mais nous sommes de l’avis que nul Malien ne soit persécuté pour son opinion divergente ».

Force est de reconnaître qu’aujourd’hui, les Maliens soutiennent Assimi Goïta et son gouvernement. La majorité est satisfaite des résultats obtenus en un an, surtout sur le plan sécuritaire.

L’Imam Mahmoud Dicko est respecté par bon nombre de Maliens, non seulement parce qu’il est un leader religieux, mais aussi pour son engagement pour une bonne gouvernance. En s’affichant comme un opposant à la Transition, l’imam Mahmoud Dicko risque de perdre sa crédibilité et son image dans son combat pour la bonne gouvernance.

Hamadoun Alphagalo (De notre correspondant permanent au Mali)