Gros scandale à la Caisse nationale de sécurité sociale : un actif immobilisé vendu à vil prix à un sujet Libanais

Par Nicolas NDONG ESSONO / 04 avr 2022 / 0 commentaire(s)
Le terrain nu

Sans rendre publique la mise aux enchères, comme c’est l’usage, pour espérer un meilleur montant de la transaction, Jean-Maurice Ayine et Patrick Ossi Okori ont vendu à un sujet Libanais, un terrain et une galerie commerciale à Oloumi. Pour 1,450 millions Fcfa. Le tout en catimini. Alors que le double investissement vaut très largement beaucoup plus. Si nous étions dans un pays sérieux, cette transaction serait devenue une affaire d’Etat avec l’audition à l’Assemblée nationale et par les services de renseignements des personnes impliquées dans cette vente au rabais de biens publics. Mais comme nous sommes au Gabon…

 

Lançons une foëne pour ramener à la surface le péril gabonais. Nous sommes le mercredi 5 janvier 2022. Ce jour-là, Germain Ella Nguema, le président du Synamag (Syndicat national des magistrats du Gabon), au cours de sa rentrée syndicale à Libreville, fait une déclaration qui fait trembler toute la République : « Voler, fait-il constater, détourner, se servir à satiété, s’enrichir au maximum est le leitmotiv de nos dirigeants (…) chaque gouvernement a en son sein les génies de la surfacturation, de détournement et de l’affairisme qui mettent en péril la réalisation des projets sociaux (…) qu’est-ce que le peuple gabonais a fait pour mériter de pareils dirigeants ? ». Un peu plus de deux mois après, voici que nous mettons les pieds dans le plat. A vrai dire, nous y étions déjà, avec les transactions « boudonesques » quasiment identiques de la SEEG.

Pour sûr, la désormais terrible affaire de la cession à vil prix d’un bien immobilier appartenant à la CNSS – une structure publique – à un sujet libanais questionne sur la nature de l’attachement de certains enfants de ce pays au respect de la Constitution et leur amour pour la Patrie. En effet, dans son titre préliminaire des principes et des droits fondamentaux, article premier alinéa 21°, la mère des lois proclame que « chaque citoyen a le devoir de défendre la Patrie… ». Or en agissant comme ils l’ont fait, Jean Maurice Ayine et Patrick Ossi Okori, respectivement président du Conseil d’administration et Directeur général de la Caisse nationale de sécurité sociale, sont loin d’avoir défendu les intérêts du Gabon et des Gabonais. Démonstration !

Comme nous l’annoncions dans notre précédente édition, un gros scandale rythme désormais le fonctionnement de la Cnss sous l’ère Patrick Ossi Okori. De quoi s’agit-il ? En 2015, la Cnss ambitionne de valoriser l’une de ses parcelles dans la zone commerciale d’Oloumi, en y érigeant un économat social pour ses retraités et ses assurés, aux fins de lutter contre la vie chère et de contribuer à la politique sociale de l'Etat.

Le tribunal laissé en plan

Sur le projet, plusieurs entités sous contrat avec la Cnss (maître d'ouvrage qui a validé ce chantier en 2015 puis en 2017) sont impliquées : Techno BTP, l’entrepreneur qui exécute tous les travaux ; Archi-Pro, l’architecte ; Archi-Plus, le promoteur commercial dont la mission est de conseiller la CNSS sur la manière de valoriser le site ; Apave, le bureau de contrôle international pour vérifier la qualité des travaux.

 

Alors que les travaux allaient bon train depuis deux ans déjà ; que plusieurs réservataires ont versé des fonds à la Cnss pour s’assurer de la disponibilité de leurs magasins… patatras… tout ou presque s’est arrêté au lendemain du limogeage du Dr Desiré Lasségué du poste de Dg de la Cnss lors du Conseil des ministres du 25 août 2017.

Son successeur, le Dr Nicole Assélé, voulant gommer les traces de la gestion de son prédécesseur, suspend, le 11 septembre 2017, le projet de construction de cet économat. Dès lors, plus rien ne sera fait sur le chantier, hormis son gardiennage et son entretien par Techno BTP.

Selon une source proche des services de renseignements, « l’affaire de l’économat social sis à Oloumi est un actif toxique pour tous ceux qui sont trempés dans ce dossier. Dans la comptabilité de la Cnss, plusieurs centaines de millions de factures payées à d’autres sociétés sur ce chantier ont été enregistrées ».

Néanmoins, les réservataires des magasins sont remboursés pour la plupart, après avoir subi un préjudice à cause des promesses non tenues de livraison à temps des magasins. Certains qui avaient déjà commandé des marchandises, se sont retrouvés avec des importants stocks périmés...

Lors du Conseil des ministres du 18 juillet 2019, Romaric Ghislain Youmou Mbodot remplace Nicole Christiane Asselé à la tête de la Cnss. Lui aussi, il laisse les choses en l’état jusqu’à son limogeage le 2 octobre 2020 et son remplacement par Patrick Ossi Okori. Dès lors, la situation - sur le projet de la construction de l’économat de la Cnss dont les travaux sont bloqués – va bouger. Las d’attendre un hypothétique dénouement, Techno BTP, l’entrepreneur des travaux, este en justice contre la Cnss pour, entre autres, rupture abusive de contrat. Nous sommes là le 03 mars 2022.

Alors que l’affaire est désormais entre les mains de la justice et qu’elle attend impatiemment la suite, Techno BTP est surpris de recevoir, tenez-vous bien, sur le chantier litigieux, un sujet libanais qui dit être devenu le propriétaire des lieux.

Huit fois moins que la valeur estimée

En effet, Khalil Rihan, responsable de la société immobilière « M.K », dont le capital est de trois millions Fcfa, a acquis auprès de la Cnss, au mois de février 2022, la parcelle N°48/AB du plan cadastral de Libreville y compris ses bâtisses pour, prenez vos mouchoirs, 1,450 millions de Fcfa (un milliard quatre cent cinquante millions de Fcfa). Problème, et c’est là que commence le gros scandale, si le Dg de la Cnss a reçu quitus de son Conseil d’administration de vendre ce bien, il lui a été fait l’obligation « préalable » de procéder à « l’évaluation du terrain et du bâti ». Or, selon des experts en matière foncière, à la date d'aujourd'hui, cet actif immobilisé cédé tutoierait les 8 milliards de Fcfa, sinon plus.

Du coup, aucun esprit éclairé ne peut croire à la bonne foi de Jean Maurice Ayine et de Patrick Ossi Okori qui ont vendu ce bien public sans explorer d’autres voies pour le rentabiliser.

Questions : comment peut-on vendre un actif immobilisé, comme une entreprise en liquidation, alors que d'autres opportunités s'offraient à la Cnss ? Pourquoi ce duo n’a-t-il pas pensé à l’intérêt collectif en sollicitant un emprunt bancaire, pour le montant de l'investissement, en contrepartie de son hypothèque ? Ne pouvait-il pas mettre l'investissement en concession par bail, dans une zone commerciale à forte croissance ? Comment n’ont-ils pas pensé à rendre publique l’existence d’un tel bien à vendre ?

Autant de questions qui montrent une évidence : trop de suspicions entourent cette transaction et dans un pays normal, la vente, déjà actée, au nom des intérêts supérieurs des assurés sociaux, allait être suspendue, voire annulée ! Sinon, ce serait comme si, ironise une source syndicale, Jean Maurice Ayine et Patrick Ossi Okori, pour assurer leur retraite, auraient « dealé » avec le Libanais pour céder cet actif immobilisé à vil prix et récupérer, au fil des années, des royalties. (A suivre).

Nicolas ndong Essono

 

 

 

Article du 4 avril 2022 - 5:41pm
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