Guy Nzouba Ndama : « Les journalistes des médias publics sectionnent les propos défavorables au pouvoir. »

Par Brandy MAMBOUNDOU / 23 juil 2021 / 0 commentaire(s)
Guy Nzouba Ndama.

Dans ce long entretien, l’ancien président de l’Assemblée nationale, président du parti de l’opposition « Les Démocrates », s’inquiète non seulement de l’attitude des hommes des médias d’Etat, mais également du fait que le PDG est devenu le terreau des extrémismes, qui empêchent l’avènement d’un Etat-Nation.

 

Propos recueillis par Elzo Mvoula

 

Gabonclic.info Monsieur le Président, comment se porte votre parti « Les Démocrates » ?

Guy Nzouba Ndama : Notre parti se porte bien. Nous aurions voulu nous déployer sur le terrain, dans l’ensemble du territoire national, mais, comme vous savez, les dispositions gouvernementales relatives à la lutte contre le Covid-19 interdisent les activités des partis, sauf pour le Parti démocratique gabonais (PDG), bien sûr.

Le Premier ministre avait réuni la classe politique pour demander une « espèce de trêve ». Malheureusement, c’est le gouvernement qui a été le premier à rompre cette trêve. Qu’importe, aujourd’hui, je dis à mes amis que je ne voudrais pas qu’on nous taxe de quoi que ce soit. Il vaut mieux s’en tenir aux mesures qui ont été dictées par le gouvernement, qui empêchent les réunions publiques. Pour l’instant, le bureau exécutif continue de travailler comme il se doit, et le PDG continue à ignorer les restrictions requises pour combattre le Covid-19.

Sous le règne de Brice Laccruche Alihanga (BLA), certains de vos députés auraient « dealé » avec l’ancien directeur de cabinet et étaient prêts à vous lâcher. Simple rumeur ou sujet tabou ?

Il ne s’agit ni d’une rumeur, ni d’un tabou. A Tchibanga, notre ami Jean-Pierre Douckaga avait effectué le déplacement pour recevoir le directeur de cabinet qui allait, disait-il alors, lancer les travaux de la résidence présidentielle. Le député de Tchibanga qu’il était avait jugé utile de se déplacer. Je n’aurai peut-être pas fait comme lui, mais il l’a fait en tant que parlementaire. Je pense qu’il n’y avait pas lieu de lui prêter plus d’intentions que cela. Tous Les Démocrates sont là !

Vous avez donc confiance en vos hommes, puisque vous êtes convaincu de leur loyauté à votre égard !

Le problème n’est pas d’être loyal à mon égard. Le problème est d’être conforme à la ligne du parti. Il faut que les députés comprennent qu’ils ont été élus par le peuple et qu’ils doivent défendre les intérêts du peuple. S’ils constatent que les intérêts du peuple sont en contradiction avec les objectifs du parti, ils sont libres de l’exprimer, ils peuvent l’exprimer au cours d’un débat, au sein du parti pour que nous puissions nous prononcer sur la question. La liberté chez nous est un impératif catégorique.

J’ai constaté que le PDG a eu à prendre des décisions contre certains de ses députés, au motif qu’ils s’étaient abstenus ou avaient voté contre la loi qui dépénalisait l’homosexualité au Gabon. Ceci est anormal, je dirais même dangereux. La Constitution dit bien que « tout mandat impératif est nul ». C’est-à-dire que le député vote en son âme et conscience et n’a pas à recevoir des consignes d’un parti politique. Donc, en la circonstance, le Parti démocratique gabonais a joué complètement faux.

Lorsque nous avons créé ce parti, nous étions partis du constat que l’espace politique était pollué par le Parti démocratique gabonais. J’utilise le verbe « polluer » parce que le PDG empêche les autres partis de se déployer. Les places publiques sont réquisitionnées par le PDG pour la durée de la campagne, ce qui ne permet pas aux adversaires du PDG d’occuper l’espace public républicain. Vous savez, par exemple, que les opposants n’ont pratiquement plus d’accès aux médias publics. Et quand c’est le cas, les journalistes des médias publics sectionnent des propos qui critiquent le pouvoir.

Donc, nous étions partis de ce constat et nous disions que si nous avions choisi la dénomination « Les Démocrates », c’est parce que nous voulions faire comprendre que la première des libertés d’un citoyen, c’est la liberté d’expression.

Si nous sommes d’accord sur ce constat, il est tout à fait normal qu’un député puisse s’exprimer en toutes circonstances sur n’importe quel sujet.

Qu’est-ce qui est important pour un président de parti politique, l’adhésion du militant ou sa loyauté ?

Je pense que le premier acte d’un militant, c’est l’adhésion au parti. Il adhère à un parti à partir des objectifs que se fixe ce parti. Nous sommes un parti social-démocrate ; nous militons pour la libre entreprise parce que c’est l’entreprise qui crée la richesse du pays. C’est la fidélité aux objectifs du parti qui est l’élément principal. Maintenant, une fois que le militant a conscience de cela, il se bat pour que dans un contexte concurrentiel, il puisse exprimer ses idées et défendre les idéaux du parti.

L’actualité politique dans notre pays est marquée, entre autres, par le retour au PDG de ceux qui se disent « fils spirituels » d’Omar Bongo. Guy Nzouba Ndama et « Les Démocrates » seraient-ils déjà en train de faire leurs bagages ?

Ecoutez, je n’ai pas à juger des compatriotes qui agissent en leur âme et conscience. A mon sujet, je ne m’en cache pas, c’est Omar Bongo qui m’a amené en politique et c’est pourquoi, je me réfère souvent à lui. Au PDG, beaucoup de militants ne se retrouvent plus. Mais ils ont peur de s’exprimer parce qu’ils pensent que le PDG est toujours un Parti-Etat.

En ce qui concerne Les Démocrates, nous restons là où nous nous sommes installés à notre création. A ceux qui veulent me voir revenir au PDG : qu’ils me fassent un courrier pour me demander si je veux revenir au PDG. A ce moment, je poserai mes conditions. La première ce sera pour leur demander de venir au parti « Les Démocrates ».

Une certaine opinion vous accuse de faire le jeu du pouvoir. Elle vous caricature parfois comme un cheval de Troie de celui-ci. Que répondez-vous ?

J’ai dit tout à l’heure que le PDG était devenu le parti des ayatollahs. Mais, il faut aussi dire qu’il y a des ayatollahs de l’autre côté, c’est-à-dire dans l’opposition. C’est ce qui m’a souvent amené à dire que je n’avais pas, de notre pays, une vision manichéiste, c’est-à-dire que d’un côté, il y a les mauvais, ceux qui sont au PDG, et de l’autre côté, les bons, ceux qui sont dans l’opposition. Je n’ai pas cette vision caricaturale de notre société. C’est pour cela que je n’autorise personne à me caricaturer. Parce que pour porter un jugement sur moi, il faut avoir parcouru le trajet qui a été le mien et avoir traversé les montagnes que j’ai eues à traverser, les épreuves que j’ai eues à connaître dans la vie politique. C’est à partir de là qu’ils pourront porter un jugement sur moi. Je ne suis le cheval de Troie de personne. Si faire de l’opposition, c’est crier à longueur de journée qu’Ali Bongo est ceci, Ali Bongo est cela, je ne suis pas de cette trempe. J’ai une autre idée de notre société, j’ai une autre idée du peuple gabonais, qui doit rester respectueux de la personne humaine.

Je voudrais donc être clair, et j’espère qu’on ne reviendra plus sur ça, pour dire que Les Démocrates sont ancrés dans l’opposition. Les Démocrates ne sont le cheval de Troie de personne. Nous travaillons pour nos idées, pour notre pays et pour les Gabonais. Mais si demain, je vous le dis, on me dit que le président de la République aimerait me rencontrer, j’irai le rencontrer. En janvier 2019, j’avais d’ailleurs demandé à le rencontrer, et j’ai compris par son silence que la situation n’était pas mûre pour que je puisse le faire. Mais puisque dernièrement, lors de son passage à l’Assemblée nationale, j’ai vu qu’il s’exprime normalement, j’espère que j’aurai l’occasion de le rencontrer pour que je puisse lui donner le point de vue des Démocrates sur un certain nombre de questions qui nous interpellent aujourd’hui, et qui me paraissent importantes pour le devenir de notre pays.

Donc, ces procès à longueur de journée, je les trouve malsains et enfantins.

Ailleurs, en Côte d’Ivoire notamment, où les différentes crises électorales ont fait des milliers de morts, Laurent Gbagbo vient de rentrer au pays. La réconciliation est en marche. Pourquoi ça coince chez nous après la présidentielle meurtrière de 2016 ?

Mais ça coince chez nous pour une raison simple. C’est que d’un côté, vous avez un pouvoir, qui dit qu’il n’y a pas de crise au Gabon. Et vous avez, de l’autre côté, les oppositions, je dis bien, les oppositions, où il y en a qui disent : il n’y a pas de président de la République, y en a qui disent qu’Ali Bongo est mort en 2018 à Riyad. En même temps, quand on parle de réconciliation, certains pensent que l’opposition irait armes et bagages se vendre auprès du pouvoir. Et puis, même le chef de l’Etat, que dit-il de cette réconciliation ? Vous savez, je dis toujours que diriger un pays n’est pas chose aisée, il faut d’abord savoir diriger une famille pour savoir diriger un pays.

Un chef doit être à l’écoute de tout le monde. Un chef ne doit pas être rancunier. C’était ça la force d’Omar Bongo. Il avait mis la rancune dans sa poche. Ce n’était pas un instrument politique pour lui. Le 13 décembre 2019 à Mouila, j’ai fait une déclaration pour suggérer au président de la République de jouer son rôle de président de la République, de chef de l’État, en convoquant la classe politique pour une analyse sans complaisance de la situation. Moi Nzouba Ndama, en tant que président du parti Les Démocrates, je le reconnais comme président de la République. Il est à son poste de président de la République. Mais le pays a besoin de voir une autre forme de gouvernance. Cette autre forme de gouvernance ne peut partir que d’une concertation réelle entre les forces vives de la nation. D’autres disent qu’Ali Bongo doit partir. Moi je dis qu’Ali Bongo est président de la République, il garde son poste jusqu’à la fin de son mandat. Mais entendons-nous sur l’essentiel, sur un minimum, pour que le pays reparte. Tant qu’il n’y aura pas cette entente minimale de la classe politique, avec le président de la République, nous n’avancerons pas.

Aujourd’hui, on parle de la paix de braves. Il y en a qui parlent de dialogue. Moi je dis que, quel que soit le terme, il faut absolument une rencontre entre le président de la République, son gouvernement et la classe politique.

A titre d’illustration du manque de dialogue entre les gouvernants et les gouvernés, nous avons, en tant que parti Les Démocrates, initié une pétition nationale contre la dépénalisation de l’homosexualité. Au terme de celle-ci, où près de 300 000 Gabonaises et Gabonais ont apposé leurs signatures sur le document qui leur était soumis, nous avons demandé à rencontrer le Premier ministre, afin de lui remettre les conclusions de ladite pétition. Jusqu’à ce jour, nous n’avons reçu aucune réponse. Comment voulez-vous qu’un pays fonctionne normalement si celui qui est censé être le chef de la majorité a peur de rencontrer ses adversaires ?

Vous arrive-t-il, au milieu de la nuit, de vous réveiller et de vous mettre à la place des Bertrand Zibi Abeghe et des autres prisonniers politiques qui croupissent à Sans-Famille ? Etes-vous sensible à la situation de Jean-Pierre Lemboumba-Lepandou, Ludovic Ognagna, Charles Mba, Séraphin Moundounga, Alfred Nguia Banda… qui vivent aujourd’hui en exil avec des familles complètement désarçonnées ?

                                                                                                                          Mon jeune frère, dans ma vie, avant d’entrer dans la vie active, j’ai perdu trois ans de ma vie que j’ai passés dans le monde carcéral. Douze mois à Gros-Bouquet et deux ans à Mouila, dans le cadre d’un service militaire que je n’avais jamais sollicité. Quand on a traversé ces moments-là, on ne peut pas être insensible à ce qui arrive à nos compatriotes, qui sont aujourd’hui incarcérés pour leurs opinions. On ne peut pas être insensible au fait que des compatriotes vivent en exil, tout juste parce qu’ils ont peur pour leur sécurité. Ils doivent rentrer au Gabon, c’est leur pays.

Quand un chef de famille vit à l’extérieur et que sa femme et ses enfants restent ici au Gabon, qu’est-ce que vous voulez que cette famille-là puisse penser de ce pouvoir ? Le pouvoir crée lui-même les conditions de la haine qui se développe au sein de notre communauté nationale. Parce qu'il ne présente pas, un seul instant, un acte qui montre qu’il décide à changer de mentalité comme le disait Omar Bongo, à s’ouvrir. Il faut que le pouvoir s’ouvre. S’ouvrir ce n’est pas nécessairement pour que des gens partent de l’opposition pour avoir des postes ministériels. S’ouvrir, c’est permettre à chacun de pouvoir circuler librement dans son pays, de pouvoir s’exprimer librement. Il faut absolument que le président de la République sache que c’est lui seul qui détient le pouvoir de permettre à ses compatriotes de vivre en liberté, de vivre dans un pays démocratique. C’est lui seul, et personne d’autre.

De plus en plus de Gabonais s’inquiètent de la haine exponentielle qui s’incruste dans les cœurs de certains compatriotes contre d’autres. A votre avis, est-ce un sujet d’une réelle inquiétude ?

(Long silence…, puis l’air grave) C’est un sujet d’une réelle inquiétude. Quand je lis sur les réseaux sociaux, nos compatriotes qui sont devenus des experts en ceci ou en cela, les propos qu’ils tiennent sur certaines autorités, je suis écœuré. Mais quand je vois qu’en retour, le pouvoir ne fait rien pour amener les Gabonais à se regarder autrement que par l’expression de la haine, je suis désabusé. Donc, il faut absolument que chacun de nous prenne conscience de cela. Mais celui qui doit prendre conscience de cela en premier, c’est le pouvoir, c’est le président de la République, qui a la responsabilité de la conduite de la politique du pays. Puisqu’aujourd’hui, il est le seul détenteur du pouvoir exécutif. C’est lui qui est le premier responsable, c’est lui qui doit donner les premiers signaux. Il ne faut pas seulement appeler les gens en disant je suis disponible. Mais vous êtes disponible, comment fait-on pour parvenir à vous ? Le président doit créer des relais, à partir des hommes responsables.

Le concert des casseroles a fait deux morts dernièrement et de nombreuses interpellations. Cela se justifiait-il ?

(Mine renfrognée) Pas du tout ! D’autant plus que les deux morts ne sont pas morts dans la rue. Le concert des casseroles ne s’est pas passé dans la rue. C’est chacun qui frappait sur sa casserole, dans sa concession. Je ne sais pas pourquoi le pouvoir est si fébrile. Chaque fois, on nous dit toujours oui, on a mené des enquêtes et à chaque fois, on n’a jamais vu les conclusions de ces enquêtes. On court pour envoyer des ministres, chacun dans son ethnie, pour aller discuter, verser un peu d’argent, une obole, aux familles éplorées. Mais ce n’est pas ça ! C’est dangereux ce qui se passe actuellement dans notre pays. Il faut qu’on mette fin à cela.

A Ndangui, dans l’Ogooué-Lolo, des maisons ont été incendiées et plusieurs orpailleurs illégaux arrêtés. Beaucoup y voient la conséquence de la gestion chaotique du Gabon par Ali Bongo depuis 2009. Ont-ils tort ?

Bon, je ne maîtrise pas encore ce dossier, mais j’ai lu sur les réseaux sociaux. Il y en a qui disent que ce sont des militaires qui ont mis le feu aux habitations, d’autres qui disent autre chose ! Ce sont les orpailleurs étrangers qui, pour effacer toute trace, auraient provoqué ces incendies. Je ne me prononcerai pas dessus, dès lors que je ne maîtrise pas suffisamment le dossier. Mais je dirai tout simplement que l’exploitation minière, pour ce qui concerne un certain nombre de métaux, particulièrement l’or et le diamant, doit obéir à un certain nombre de règles qui doivent être prises par le gouvernement. Des gens viennent d’un peu partout, s’installent dans la forêt, exploitent illégalement, en y mettant des produits qui polluent nos rivières et ruisseaux. Il faut absolument mettre un terme à cela.

A deux ans de la prochaine présidentielle, alors que le pouvoir se prépare en recrutant à tout-va, l’opposition semble aphone et ne propose rien face à la lassitude des Gabonais. Peut-on s’attendre à un sursaut patriotique de votre part pour redonner espoir aux Gabonais ?

Si le pouvoir s’organise à deux ans de l’élection présidentielle, c’est son droit. Mais ce pouvoir, on ne le voit que pour les élections. C’est là où ils vont maintenant un peu partout distribuer ceci, cela, aider des familles, alors que depuis cinq ans, on n’a rien vu. L’opposition est effectivement aphone. Mais vous savez, pour que les partis politiques puissent travailler, il faut disposer des moyens. Le pouvoir dispose des caisses de l’État, le PDG dispose des caisses de l’État. Je sais qu’au PDG, on ne cotise pas. Quand j’étais à la tête de l’Assemblée nationale, en accord avec le secrétaire général du Parti démocratique gabonais, on faisait des retenues à la source aux députés. Ça ne m’avait pas valu que des félicitations, mais des invectives de la part de mes collègues députés qui estimaient que je ne devais pas le faire. En dehors des parlementaires, du moins des députés, ce sont eux que je connaissais le mieux, je ne sais pas qui cotise au PDG. Donc l’argent qui sert au fonctionnement du PDG, c’est l’argent du contribuable.

Les lois disent que l’État doit subventionner les partis politiques, le gouvernement ne l’a jamais fait. Donc aujourd’hui, les partis politiques doivent vivre des moyens de leur fondateur, des différents membres de leurs bureaux respectifs. C’est difficile de demander à nos militants, sachant que ceux qui militent dans les partis d’opposition sont souvent des retraités et des sans-emploi. Les gens qui ont un emploi ont peur pour leurs emplois, donc ils ne militent pas ouvertement dans les partis politiques, et s’ils ne militent pas, ils ne vont pas cotiser. Donc, nous avons des moyens disproportionnés qui font qu’aujourd’hui, l’opposition semble être aphone. Mais individuellement, il y en a qui font le travail sur le terrain sans que cela ne paraisse dans les médias. Vous ne pouvez pas le savoir, puisque la télévision nationale ne médiatise pas les activités des partis de l’opposition. Gabon Télévisions suit seulement les partis de la mouvance présidentielle.

Comment appréciez-vous la dernière sortie d’Ali Bongo devant le Parlement réuni en congrès ?

Écoutez ! En tant qu’humain d’abord, j’ai été satisfait de voir le président de la République livrer son message aux parlementaires en direct. Mais je dois vous dire que j’ai été déçu par sa prestation. Alors que des compatriotes de sa majorité sont des promoteurs de la paix des braves, je m’attendais à ce que le président de la République, à cette occasion, donne son point de vue par rapport à cette question. Il n’en a rien dit. Quand le président de la République appelle à l’unité des Gabonais, quel est l’homme politique qui n’appellerait pas à l’unité des Gabonais ? J’attendais mieux du président de la République !

On a l’impression que dans ce pays, la politique est le centre de tout. N’est-ce pas lassant ?

Il faut absolument qu’on règle les problèmes politiques de notre pays, notamment pour éclairer l’horizon du vivre-ensemble. A partir du moment où nous aurons réglé ces problèmes, un membre du gouvernement, homme ou femme, comprendra qu’il est d’abord au service de la République, au service des Gabonais, pas au service d’un parti politique ; que les ministres ne sont pas des fonctions subsidiaires, mais ceux qui ont la charge d’exécuter la politique déclinée par le chef de l’Etat, au lieu qu’ils aillent découvrir en Conseil des ministres des projets qui concernent pourtant leur département ministériel. A cet égard, l’alternance au sommet de l’Etat me paraît être une nécessité. J’ai la ferme conviction qu’il peut arriver, dans ce pays, et il arrivera que nous assistions à une alternance pacifique par la voie des urnes. Mais pour cela, il faut que les acteurs qui se battent pour cette alternance se donnent les moyens et qu’ils arrêtent d’envoyer dans les bureaux de vote des ventres mous, qu’ils arrêtent de marchander leurs représentations dans les bureaux de vote, parce que nous qui nous réclamons de l’opposition, nous avons notre part de responsabilité dans le marasme électoral que nous connaissons dans ce pays.

Pourtant, vous avez travaillé avec Ali Bongo. A-t-il complètement changé ?

Nous pouvons bien vivre ensemble dans ce pays ; lui, il a sa maison et moi j’ai la mienne. Pourquoi ne ferions-nous pas en sorte que nos enfants puissent apprendre dans de meilleures conditions, que nous puissions circuler sur de bonnes routes en tout temps, sous la pluie ou sous le soleil ? Pourquoi est-ce qu’il faudrait toujours que nous envoyions nos malades à l’étranger ? A quoi servent tous ces hôpitaux qui ont été construits, il y a quelques années ? A quoi servent tous ces médecins que nous formons à l’Université des sciences de la santé ? J’en appelle au président de la République, je l’ai connu pendant que nous étions du même bord. La réflexion qu’il avait, je l’ai encore dans ma mémoire, les idées qu’il avait sur le développement de ce pays. Je crois en Dieu, je crois en la rédemption de chacun, chacun de nous peut se remettre en cause, en disant : hier j’étais rancunier, aujourd’hui il faut que je change pour le bien de notre pays. Dans l’intérêt de notre pays, laissons la rancune de côté. Il faut que notre pays retrouve ses lustres d’antan et qu’il redevienne cet eldorado des années 70- 80, qui ont fait que, malgré ce qu’on disait, les gens venaient par pirogue parce qu’ils pouvaient trouver de l’emploi ici.

 

Article du 23 juillet 2021 - 11:33am
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