Le gouvernement est entièrement responsable de la crise dans les Régies financières

Par Brandy MAMBOUNDOU / 16 nov 2021 / 0 commentaire(s)

Il fallait s’y attendre, l’indolence du Gouvernement a eu raison de la volonté d’accalmie et d’apaisement des partenaires sociaux des Régies financières. Si depuis le 15 octobre, nous assistons à des mouvements de protestation de plusieurs syndicats des Régies financières sans que le gouvernement n’y accorde la moindre attention, la donne va bien changer avec l’entrée en lice des collecteurs.

En effet, à la faveur d’un point de presse tenu le vendredi 12 novembre 2021, la puissante Fédération des collecteurs des régies financières (FECOREFI), qui regroupe les administrations collectrices des deniers publics, à savoir les Douanes, les Impôts, les Hydrocarbures et le Trésor, a clairement annoncé l’entrée en grève générale illimitée de ces mamelles de l’Etat au terme des huit jours du préavis déposé sur la table du Gouvernement.

Comment et pourquoi en sommes-nous arrivés là ?

La profonde crise qui sévit dans les Régies financières n’a d’autres sources que l’inconséquence et le manque de réelle volonté du gouvernement à y trouver des solutions pérennes. Il s’ingénie dans la cosmétique politique, tout en bluffant le président de la République, chef de l’Etat de ce que la situation est sous contrôle et parfaitement maîtrisée.

La réalité est tout autre et la montée d’adrénaline de ces derniers jours, ainsi que l’éventualité d’une paralysie de la chaîne de la collecte des ressources budgétaires par les collecteurs des régies financières le démontre. La Fédération des collecteurs des régies financières l’a dit : « Le silence méprisant du gouvernement ne pouvait donner un autre résultat que celui-là ».

Comment expliquer que ceux qui sont censés mettre en musique la vision politique du président de la République soient ainsi indolents face à une situation qui pourrait fortement compromettre l’exécution de sa politique de développement par manque de ressources nécessaires ? Le principe de partenariat existe-t-il réellement et sincèrement dans notre pays ?

La signature des deux décrets consacrant les primes dues aux agents des Régies financières et administrations assimilées en décembre 2020 par le chef de l’Etat aurait pu apporter une accalmie certaine si le gouvernement avait pris des textes d’application garantissant leur parfaite applicabilité. Mais à ce jour, aucun de ces textes n’a été pris, sauf celui mettant en place le Comité de coordination et le comité technique.

Le comité de coordination, chapeauté par le ministre de l’Economie et de la relance, assisté de deux vice-présidents que sont le ministre du Budget et des comptes publics et celui du Pétrole, du gaz et des mines ne s’est jamais réuni, malgré les multiples interpellations des partenaires sociaux.

Le comité technique, quant à lui, n’est qu’une chambre d’enregistrement où les Secrétaires généraux, les Directeurs généraux collecteurs et les partenaires sociaux, viennent constater l’atteinte ou non des objectifs budgétaires prescrits mensuellement aux administrations collectrices, et applaudir si les paiements sont effectifs.

Les interpellations des partenaires sociaux sur la nécessité de revoir certaines dispositions du décret n°00429/PR/PM du 24 décembre 2020 n’ont eu de réponse des ministres que celle de nous faire savoir que c’est le chef de l’Etat qui a signé et, par conséquent, est le seul responsable de cette situation.

A l’analyse des faits, nous pouvons affirmer, sans risque de nous tromper, que le gouvernement a bel et bien induit le chef de l’Etat en erreur et ne ménage aucun effort, par des subterfuges en tout genre, d’édulcorer la réalité en voulant faire passer les agents des régies financières pour des enfants gâtés dont la boulimie financière est indécente, alors qu’ils sont entièrement responsables de cette profonde crise qui nuit sérieusement au bon fonctionnement de la collecte des recettes de l’Etat.

Analysons la situation ensemble

En janvier 2021, le gouvernement, dans un balai médiatique impressionnant, a inondé les plateaux de télévision et de radio de la place sans oublier la presse écrite pour faire, non seulement la promotion des décrets signés par le chef de l’Etat, mais aussi et surtout réitérer leur indéfectible attachement à la vision politique du chef de l’Exécutif.

Au cours de ces passages, les ministres, dont celui du Budget et des comptes publics, n’ont eu de cesse de rappeler que la Prime à la performance budgétaire (PPB) est désormais assise sur les performances des administrations collectrices, conformément à l’article 8 du décret n°00429/PR/PM du 24 décembre 2020, qui dispose que « lorsque les objectifs budgétaires prescrits sont atteints, la Prime à la performance budgétaire est payée pour son montant intégral (…) ».

Mieux, le ministre du Budget et des comptes publics avait insisté sur la non-variabilité de cette prime, contrairement à l’Intéressement spécifique consacré par le décret n°00428/PR/PM du 24 décembre 2020.

Autre information et non de moindre, l’Etat consacre annuellement, et ce depuis 2018 dans la loi de finances au chapitre 2 des charges de personnel, une allocation de 15 milliards de francs CFA au titre des primes des fonctionnaires, et donc un appui budgétaire de 1,250 milliards de franc CFA par mois.

Toute chose qui interroge sur la gestion et le paiement des primes aux agents des régies financières. Cette allocation budgétaire votée par le parlement et promulguée par le chef de l’Etat constitue, en réalité, l’effort de l’Etat pour la motivation des agents. Bien insuffisant au regard de la réalité économique de notre pays et des missions de plus en plus complexes des administrations collectrices. Au simple regard de cet appui budgétaire, le mois de février 2021 aurait dû être payé.

Autre fait curieux, les ministres de l’Economie et de la relance, du Budget et des comptes publics et celui du Pétrole ont clairement annoncé que le paiement de la Prime à la performance budgétaire (PPB) attendu ce 15 novembre 2021 serait de 41 %, alors que toutes les administrations ont bel et bien dépassé les objectifs budgétaires prescrits pour le compte du mois d’octobre 2021.

Les Douanes ont réalisé plus de 102 %, les Impôts plus de 100 % et les Hydrocarbures plus de 106 %. Comment et pourquoi les agents doivent-ils être payés à 41 %, alors que l’article 8 du décret rédigé par eux-mêmes prévoit le paiement du montant intégral en cas d’atteinte des objectifs ? Est-ce également le chef de l’Etat qui leur a demandé de violer sa signature, au risque de démobiliser les agents ?

Est-ce le chef de l’Etat qui instruit le gouvernement de demeurer complètement aphone face à une crise qui pourrait faire plonger notre économie et conduire notre pays dans une situation de profonde léthargie financière ? Pourquoi le gouvernement méprise-t-il ainsi les partenaires sociaux, malgré les efforts de ces derniers à maintenir l’accalmie et à proposer des solutions alternatives de sortie de crise ?

N’oublions jamais que les partenaires sociaux des régies financières ont été plus que républicains, chaque fois que la situation de notre pays l’exigeait. Partant des décotes de plus de 30 % de nos primes depuis 2017, voilà qu’aujourd’hui, dans un mépris total, le gouvernement se sert des régies financières comme d’une variable d’ajustement dans leur incommodante gestion des finances publiques.

La Fédération des collecteurs des régies financières (FECOREFI) n’a jamais fait mystère de ce que le gouvernement n’a aucune volonté réelle de régler la situation. Cette puissante fédération demande, depuis juillet 2020, le nettoyage du fichier du personnel et des primes, qui ferait économiser à l’Etat plus de 1,6 milliard de francs CFA par mois. En réponse, non seulement le gouvernement n’a jamais accédé à cette demande somme toute responsable et logique. Mais bien au contraire, les partenaires sociaux assistent à des recrutements à la pelle et ce, au mépris des hautes instructions du président de la République gelant les recrutements dans l’administration publique.

Depuis le 18 octobre 2021, la FECOREFI a déposé son mémoire en réplique afin d’apporter sa contribution à la recherche de sortie de crise. Au silence méprisant sans égal qui est le leur, le gouvernement décide même d’aller plus loin dans le mépris en coupant, sans explication et en violation des textes, la PPB. C’est dire toute leur volonté d’annihiler les efforts du président de la République, chef de l’Etat, à relancer notre économie.

Le chef de l’Etat gagnerait fortement à s’entretenir avec les partenaires sociaux des régies financières si tant est qu’il veut la paix sociale dans notre pays. Car, le gouvernement s’est fortement fourvoyé sur cette question en érigeant la prestidigitation en mode de gestion des régies financières.

Dans tous les cas, la FECOREFI tient le bon bout en ayant fait preuve de responsabilité jusqu’au bout, et en épuisant toutes les voies de procédures nécessaires. Personne ne leur fera un procès en sorcellerie lorsqu’ils vont déclencher la quatrième vague, plus violente que le variant Delta, sur les régies financières au terme de leur préavis. Les agents sont appelés à strictement respecter la distanciation sociale avec leur bureau.

Ils l’ont dit, ils feront de ce pays ce que le Gouvernement a décidé qu’il soit.

Sylvain Ombindah Talheywa III (Porte -parole de la FECOREFI)

Article du 16 novembre 2021 - 12:00pm
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