Le poids des pierres

Par Brandy MAMBOUNDOU / 05 juil 2022 / 0 commentaire(s)

 

À la question de savoir quelle est la différence entre une pierre et un caillou, nombreux ne verraient que des émanations géologiques de formes et de couleurs différentes avec cependant une particularité commune, le poids. Les pierres sont aussi lourdes que les cailloux.

Alors, porter les pierres ou les cailloux revient à faire face à de graves perturbations de vie sur quelque plan que ce soit dont la santé, l'emploi, le logement, l'éducation, la famille, l'alimentation, le business, la spiritualité, la politique, etc.

À la simple observation de cette liste non exhaustive, il va sans dire que le monde n'est fait que de carrières, c'est-à-dire des mines d'où sortent les grosses pierres qui, par la force des choses ou par hasard, viennent à nous pendre au cou. 

Ce petit tout revient à dire que les problèmes, à défaut de nous tomber spontanément dessus à l'instar d'un missile de cinq tonnes s'abattant sur un dépôt de munitions au voisinage d'un centre commercial, nous les cherchons volontairement en tendant la tête au fauve, ou involontairement en tombant dans des pièges. 

Dans tous les cas, on s'en sort avec le cou plié sous le poids des pierres.

En santé, la maladie est une grosse pierre susceptible d'ouvrir les portes de la mort qui, elle-même, est un poids à vie pour la famille. Il y a sur ce chapitre, des maladies héréditaires qui nous pendent au cou dès la naissance, elles finissent toujours par sortir de leurs cocons pour sévir à vie. 

Inversement, le milieu ou le mode de vie sont également des mines de maladies. Le paludisme est partout en zone équatoriale, c'est une pierre flottante susceptible de chuter à tout moment. 

A contrario, mettre un accent particulier sur l'alcool, le tabac... est une bonne activité minière qui finit par rougir les lèvres ou gonfler le bidon. 

En nos milieux, on parlera de sorcellerie alors que l'activité rénale est en souffrance aggravée avec, chez l'homme, une balèze insuffisance sexuelle, l'impuissance.

Quand, pour faire face à la pression familiale, des jeunes filles acceptent les exigences de la main qui donne, on soulève également de grosses pierres dont les petits serpents qui bouffent tout à l'intérieur à côté des MST. 

Sur un autre plan, la pléthore des jeunes fous le long des rues est généralement la conséquence immédiate d'un trouble fait de vols, braquages, escroqueries dont les victimes viennent à solliciter la justice de la forêt pour sévir. In fine, on porte le Kilimandjaro autour du coup. 

À propos de l'emploi avec son accotement qu'est le chômage, le stress ressort comme un véritable poison de vie. Que l'on soit chômeur de première ou deuxième génération (avoir déjà travaillé ou non), la pression est forte face aux besoins directs ou collatéraux. C'est un poids au réveil des enfants. Sortir tôt pour traîner aux abords des chantiers ou magasins pour faire des petits boulots avec un CV lourd. C'est une pierre explosive autour du cou à l'heure où la famille et les amis se font transparents.

De même, nombreux sont ceux dont le chant du coq fait monter la tension de revoir la bouille de ce patron préfabriqué nul et tribaliste ou raciste qui se défoule sur les collaborateurs. On a envie que de partir. In fine, on se retrouve à prendre des antidépresseurs par la faute d'un bouffon.

Or, quand on se rappelle avoir correctement satisfait les exigences scolaires et universitaires, se retrouver en logement dans l'arrière pays exposé aux affres de l'insécurité, avec des enfants scolarisés dans des porcheries, on se demande pourquoi l'école est une clé en or pour les uns et une pierre au cou pour les autres. Toutefois, à bien regarder, de nombreux chômeurs traînent les relents forts de souillure du fait de la régularité de défiance de la morale. 

C'est un poids.

Quand, en marge de quelques soubresauts, on pense avoir franchi avec succès quelques étapes avec une famille constituée, parce que la famille est la première richesse de l'homme, selon les coutumes, on peut curieusement se retrouver enclin à des difficultés structurelles conduisant généralement au démantèlement de la famille qui, à l'occasion, révèle qu'elle a été bâtie sans pierres ni cailloux pour donner du poids au socle vacillant. 

C'est une poisse qui fait porter de grosses pierres aux cous du père, de la mère, des enfants et du reste de la famille. Car l'échec d'un mariage qui se termine devant le juge des affaires familiales est un bloc de granit autour du cou, un poids lourd.

Mais, une famille, avec ou sans les mêmes personnes peut toujours se reconstruire, c'est la résilience qui voudrait que l'on se relève après une chute. Malheureusement, quand, pour s'occuper de cette famille non inscrite au chapitre des bonnes rétributions, on prend le chemin du business pour se rendre compte après que les voies y sont très rétrécies. 

Ainsi les tarifs douaniers au Gabon à ce jour sont une vraie grosse pierre aux cous des opérateurs économiques. D'où la vie chère qui impacte les ménages dont les plus faibles traînent à même le sol le poids de la sous-alimentation. Un vrai poids alliant le risque de famine ou de malnutrition.

Face à cet ensemble de risques, un peuple ayant assimilé que le royaume des cieux appartient aux gens qui ont faim, qui ont soif, qui pleurent, qui sont pauvres... ira se confiner dans des églises maboko ya likolo, c'est-à-dire bras levés au ciel pour faire tomber le bonheur qui sortira de leurs misérables poches pour engraisser celles des pasteurs comme pour appliquer les écrits selon lesquels "on prendra chez ceux qui en ont moins pour ajouter chez ceux qui ont plus".

Il ressort in fine un égarement du peuple sur le chemin de la spiritualité. C'est un poids de grosse pierre sur le chemin de l'indépendance, loin de la crise culturelle.

À la question de savoir quelle est la position du politique face aux pierres autour du cou du peuple, on reprendra Me Louis Gaston Mayila qui, au temps de sa splendeur, avait dit que les déclarations politiques ne sont pas des règles de droit.

En substance, le politique à travers les promesses a déjà tout fait, mais il porte une grosse pierre autour du cou à la veille des élections, car conscient que les pierres autour du cou du peuple ont été en partie sculptées de sa main.

C'est ça ou c'est pas ça ?

Corneille OLLOMO EKOGA (citoyen gabonais) 

Article du 5 juillet 2022 - 10:19am
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