Mali / Micro-trottoir : Les événements qui ont plus marqué les bamakois courant 2022

Par Brandy MAMBOUNDOU / 13 jan 2023 / 0 commentaire(s)
Ibrahim Harane Diallo, Coordinateur général de l'Observatoire sur la prévention, la gestion des conflits et la crise au Sahel.

À l’occasion du nouvel an, l’équipe de Gabonclic.info est descendue dans la ville de Bamako pour demander à certaines personnes les événements qui les ont marquées durant l’année 2022. Les opinions sont évidemment diverses.

Moussa Traoré, enseignant :

« L’événement qui m’a marqué le plus en 2022, c’est la mort de Soumeylou Boubeye Maïga. Voir la manière dont il est mort, cela m’a le plus marqué. Quand je vois Soumeylou Boubeye Maïga, avec les postes de responsabilité qu’il a occupés dans ce pays, comme la Sécurité d’Etat, ministre d’Etat, Premier ministre... Je me rappelle pas que c’est en 2018 qu'IBK (Ibrahim Boubacar Keïta, ndlr) lui a fait appel pour organiser les élections, il était un faiseur de roi. Après le coup d’Etat de 2020, il a accompagné les jeunes officiers, il les a poussés à créer un poste de Vice-président pour qu’il ait la main dans la pâte. Voir ce même monsieur mourir dans une situation chaotique, c’est ce qui m’a beaucoup marqué, c'est-à-dire la fin de l’homme avec ces fonctions qu’il a occupées, avec tout ce qu’il a eu, et voir sa fin, une fin tragique, c’est tristement marquant ».

Bakary Dena, Secrétaire général du Parti pour le Développement Économique et la Solidarité (PDES) :

« L’événement qui m’a plus marqué en 2022, c’est la capacité de résilience du peuple malien. Comme vous le savez déjà, dès le 9 janvier 2022, le Mali a été victime de l’embargo de la CEDEAO. Les sanctions économiques sont tombées sur notre pays, des sanctions qui ont duré six mois. Pendant six mois, les Maliens se sont montrés solidaires les uns envers les autres. Les Maliens sont restés unis derrière leurs autorités afin de surmonter ces difficultés. L’occasion pour moi de féliciter et remercier le grand peuple malien pour sa capacité de résilience, surtout le peuple malien qui est patient, un peuple malien qui est vraiment regardant. C’est ce qui m’a vraiment impressionné. Alors, ce qui m’a encore marqué en 2022, c’est aussi sur le plan diplomatique. D’abord la rupture brutale des relations entre le Mali et un de ses partenaires classiques, la France. Et le départ de la force Barkhane du sol malien, j’allais dire même des troupes françaises des terres maliennes. Le retrait d’autres pays au compte de la MINUSMA. Ensuite la situation au mois du 10 juillet 2022, la situation des 49 soldats ivoiriens qui a connu, le 6 janvier 2023, un dénouement de la situation. Les scandales sur le plan diplomatique ont été une situation qui m’a marqué. Au-delà de la situation entre le Mali et les autres pays de la sous-région, je peux citer le cas du Burkina Faso, je peux parler de la Guinée. Nous sommes voisins, les trois pays qui ont connu des ruptures de l’ordre constitutionnel, qui sont obligés de coopérer entre eux d’une certaine manière. Ces pays ont été sanctionnés par l’Union européenne, les Etats-Unis, la CEDEAO, etc. Donc, malgré tout, ils arrivent quand même à tenir. C’est vraiment ce qui est extraordinaire. En plus de cela, je voudrais parler également de la guerre en Ukraine. Aujourd’hui entre la Russie et l’Ukraine, une guerre d’abord, aux dires même de Poutine, serait une opération spéciale. Une opération spéciale qui a duré presqu’un an. Et qui, aujourd’hui, est entrée dans une nouvelle tournure. J’ai même envie de dire une troisième guerre mondiale qui ne dit pas son nom. L’Ukraine est aujourd’hui l’épicentre de toutes les grandes batailles, de la géopolitique et de la géostratégie. Je suis convaincu que cette guerre, quelle que soit son issue, elle va définir le nouvel ordre mondial. Voilà entre autres les quelques événements qui m’ont marqué en 2022 à mon sens. »

Amadou Aya, Premier secrétaire général de la Convergence pour le Développement du Mali (CODEM) :

« Je retiens de l’année 2022, principalement le non-respect des engagements pris par les autorités de la transition en ce qui concerne la fin de cette transition. C’est ce qui a valu à notre pays des sanctions qui ont eu des conséquences économiques très difficiles. Conséquence économique au niveau du commerce. Vous savez, notre pays est un pays essentiellement consommateur de produits venant de l’extérieur. Mais également au niveau des paysans, cela a également impacté la livraison des engrais. Ce qui fait que dans beaucoup de localités, malgré la bonne pluviométrie, il y a ce déficit d’utilisation d’engrais qui fait qu’il y aura des conséquences sur non seulement la productivité, mais aussi sur le coût des céréales. Donc, voilà en gros ce que je retiens de 2022. Je retiens également que l’année a particulièrement été difficile pour l’école malienne, parce que nous avons des étudiants qui, jusqu’à présent, depuis l’année 2022, dans beaucoup de facultés n’ont pas eu de bourse. C’est sur le plan sécuritaire qu’il y a eu une accalmie nette. Sur le plan diplomatique, un désastre, c’est au cours de l’’année 2022 que nous avons eu les différents discours du Premier ministre en septembre au niveau des Nations-Unies, nous avons eu aussi le départ des partenaires français et également l’autre partenaire suédois qui était au niveau de la MINUSMA. 2022 a connu aussi l’arrestation des 49 soldats ivoiriens qui ont été accusés par nos autorités de mercenaires. Tout ça, sur le plan diplomatique cela a donné une année très mouvementée. Enfin, sur le plan social, nous avons la résilience des Maliens face à toutes ces difficultés. Les Maliens se sont mobilisés, ont accepté la souffrance, et ont bravé les difficultés. Donc cela a démontré la capacité des Maliens à résister et c’est à saluer. »

Mahamed Touré, Journaliste, directeur de publication du site web Malimedia

« L’année 2022, a été une année fantastiques pour mon épanouissement personnel. Ce qui m’a le plus marqué, c’est la crise sécuritaire entre le Mali et la Côte d'Ivoire, l’arrestation des 49 soldats ivoiriens et les différents soubresauts dans les dossiers. C’était un film passionnant dont la fin a été impressionnante. »

Ibrahim H. Diallo, coordinateur général de l'Observatoire sur la prévention, la gestion de crise et de conflit au Sahel

« Il y a deux événements majeurs qui ont attiré mon attention courant 2022 : un événement local et événement à porté national. L'événement à portée locale, c'est surtout les nombreux paysans du centre du Mali notamment, qui ont eu des difficultés à l’accès à leurs champs de production. Comprenez bien que de nombreux paysans de ce secteur sont des producteurs, notamment des cultivateurs. Et dans cette zone du Mali, ils n'ont pas pu cultiver leurs champs, notamment les champs de riz pour des raisons sécuritaires. Rappelez-vous qu’en 2021, les groupes extrémistes violents, avec un référentiel musulman, ont pris d'assaut et brûler de nombreux champs de riz dans ces régions. Et cela, dans le but de simplement les pousser à coopérer, prêter à l'allégeance. Alors, l'année 2022, a été impactée par cette situation qui s'est produite en 2021. Donc, la situation de 2021, a créé une sorte de psychose chez des nombreux paysans du centre du Mali, notamment ceux de la région de Ségou, cercle de Niono, qui ont de difficultés dans leurs activités champêtres. Je suis allé moi-même sur le terrain. Donc cet événement m'a marqué, dans ce sens que ce sont des localités dont l'économie est liée essentiellement aux activités champêtres. Et si on est privé de cette activité, imaginez un peu les conséquences que cela peut engendrer sur le plan économique, sur le plan social de façon générale.

L'événement de portée nationale est lié aux sanctions de la CEDEAO et de l'UEMOA à l'encontre de l'Etat du Mali. Ce ne sont les sanctions qui m’ont marqué, mais l'unité la cohésion, la capacité de résilience que le peuple a fait montre, c'est vraiment cela qui m’a ému. La capacité de résilience des Maliens durant les sanctions m'a vraiment impressionné. Cela fera date dans l'histoire du Mali, parce que c'est une des rares fois où le peuple a manifesté clairement sa position, sans faille, en termes de soutien à ses autorités. Le peuple malien a montré que quelles que soient les difficultés, la lutte pour la souveraineté et l'indépendance n'a pas de prix. C'est cette dynamique, liée à la souveraineté, l'indépendance, la lutte contre le néocolonialisme, qui a habité le peuple Malien à se mobiliser comme un seul homme derrière ses dirigeants. Un dernier événement de portée nationale et internationale, c'est le président togolais, Faure Gnassingbé, qui est même l'homme de l'année. Parce que grâce à son activisme sur le plan diplomatique, qu’il est parvenu à détendre la situation conflictuelle qui était entre le Mali et la Côte d'Ivoire sur l'affaire des 49 milliaires Ivoiriens. Il est parvenu à trouver une solution à la crise.»

Propos recueillis par Hamadoun Alphagalo (de notre correspondant permanent au Mali)

Article du 13 janvier 2023 - 12:06pm
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