Sur quoi portera l’adresse du président de la République au Parlement réuni en congrès ce 25 juin ? La question brûle les lèvres des Gabonais depuis que l’initiative du chef de l’Etat a été rendue publique, tant les sujets de préoccupation ne manquent pas. L’un d’eux concerne l’introuvable réconciliation nationale depuis l’élection présidentielle de 2016.

Organisé au premier semestre 2017, le dialogue politique d’Angondjé, censé ramener la paix après les violences postélectorales, n’a pas atteint ses objectifs. Les élections qui ont suivi, les législatives et locales d’octobre 2018, avaient été boycottées par une partie de l’opposition. Le climat est demeuré délétère, au point de décidé des leaders politiques de la majorité et de l’opposition à appeler à « la paix des braves ». Cadre permanent de dialogue des partis politiques, le Conseil national de la démocratie s’est fait l’écho de cette demande.

Face aux représentants du peuple, le président de la République va-t-il soutenir les tractations qui ont eu lieu ces derniers temps et annoncer la décrispation ? Il y a peu, la Première ministre, Rose Christiane Ossouka Raponda, a reçu à son cabinet des chefs de partis de la majorité et de l’opposition, en l’occurrence Guy Christian Mavioga, Louis Gaston Mayila et Pierre Claver Maganga Moussavou. Lui-même, le chef de l’Etat, a fait montre d’une grande ouverture en accordant une audience au palais présidentiel à l’opposant Jean Eyeghé Ndong, connu pour être le principal soutien de Jean Ping, challenger d’Ali Bongo à la présidentielle de 2016.

Entre-temps, il s’est opéré une recomposition de la scène politique. Deux opposants, René Ndemezo Obiang et Frédéric Massavala Maboumba, anciens soutiens de Jean Ping, ont regagné le Parti démocratique gabonais (PDG), dont le chef de l’Etat est le président. A la suite de l’appel à la paix des braves, René Ndemezo Obiang se fait le chantre du rassemblement des « fils spirituels d’Omar Bongo », une autre initiative de décrispation.

Plus que sur le terrain des infrastructures et de la diplomatie, un chef d’Etat est attendu sur celui de l’harmonie entre ses compatriotes. A deux ans de la prochaine présidentielle, élection capitale, faut-il le rappeler, il n’est pas bon que les Gabonais continuent de se regarder en chiens de faïence. Craignant pour leur sécurité, des Gabonais ont pris, la mort dans l’âme, le chemin de l’exil. D’autres croupissent en prison, manifestement pour avoir exprimé des préférences autres que le camp au pouvoir. L’ancien député PDG Bertrand Zibi Abeghé est le cas le plus emblématique.

Le président de la République va-t-il annoncer des mesures fortes en faveur du quotidien des Gabonais ? Les mesures d’austérité consécutives au plan de relance de l’économie signé avec le Fonds monétaire international (FMI) ont provoqué un désamour entre les gouvernés et les gouvernants. Il s’ensuit des grèves à répétition des fonctionnaires qui réclament la fin du gel des concours administratifs et la régularisation des situations administratives (recrutements, intégrations, avancements et reclassements). Sans oublier l’apurement des dettes de l’Etat envers les agents publics et la revalorisation des pensions a minima.

Même si le sujet alimente les débats, les démarches en vue de l’adhésion du Gabon au Commonwealth ne saurait constituer la trame d’une prise de parole du président de la République devant le Parlement réuni en congrès. Encore moins les bénéfices financiers tirés de la protection de l’environnement ou la pandémie de la Covid 19, dont la tendance baissière se confirme jour après jour.

Le président de la République prendra donc un gros risque ce 25 juin : décevoir ou emporter l’adhésion de ses compatriotes.

Brandy MAMBOUNDOU                                                                                                                            24/06/2021   11:33