Parole en défaut et humiliation : l'ADN du Pouvoir au Gabon

Par Brandy MAMBOUNDOU / 13 jan 2023 / 0 commentaire(s)

 

Ainsi constate Jean Valentin Leyama. Dans le texte ci-après, l’ancien député de Moanda, économiste de renom, vigie de la société gabonaise avec le Copil Citoyen, homme politique au sein du parti de l’Opposition Reagir… cet universitaire pointe le mépris des tenants du pouvoir en place envers leurs nouveaux adhérents débauchés de l’Opposition. Et de lancer cet avertissement « c'est le lieu de rappeler aux autres opposants qui seraient eux aussi tentés par le Grand Saut que ce Pouvoir, à la rancune tenace, est cyniquement ingrat, même à l'égard de ses propres partisans et soutiens, surtout lorsque dans votre ancienne posture, vous l'avez voué aux hégémonies ». Lecture ! 

Dans une intervention qui avait fait date, le nouveau premier ministre, M. Bilie-By-Nze, alors vice-premier ministre dans le gouvernement précédent, avait fustigé le traitement méprisant réservé par le PDG, son parti politique, aux opposants nouvellement ralliés. Manifestement, au regard de l'humiliation, pis, du supplice infligé à René Ndemezo'o Obiang (RNO), on devine que sur coup-là, on n'a pas laissé suffisamment de marges au Premier ministre.

Tenez, membre de la CNR, RNO, contre l'avis de son leader et de son camp, a pris une part active au Dialogue d'Angondje visant à légitimer le pouvoir contesté de Ali Bongo au sortir de l'élection présidentielle de 2016. 

Il est bon de rappeler aux nouveaux maîtres du Palais que sans l'implication de MM Ndemezo'o Obiang, Ndaot et Maganga Moussavou, ce dialogue n'aurait probablement pas eu lieu ou tout au moins, n'aurait pas atteint les objectifs espérés par le Pouvoir et permis qu'ils soient confortablement assis, sans états de services connus, aux commandes en ce moment.

En retour, car c'est la politique, il est normal que ces alliés fussent récompensés : à M. Ndemezo'o, la présidence du Conseil Économique et Social, à M. Maganga, la Vice-présidence de la République, à M. Ndaot, le Conseil National de la Démocratie et quelques strapontins ministériels où ils ont pu caser leur progéniture ou proches.

Des coquilles vides

Ces fonctions sont bien entendu des coquilles vides mais les intéressés se sont réjouis du prestige et des honneurs qui les accompagnent.

Puis patatras, une fois parvenus à l'autre rive du fleuve en crue, vous entreprenez d'humilier vos alliés qui vous ont aidés dans cette périlleuse traversée. L'un a été débarqué de la vice présidence de la République dans une indignité incroyable. Les deux autres ont vu leurs proches virés du Gouvernement en même temps que le fonctionnement de leurs institutions a été rendu difficile faute de budget.

Cerise sur le gâteau : vous parvenez à convaincre le papa du CES, 75 ans, de liquider sa chapelle politique et de revenir au PDG. En échange de sa reddition, vous lui avez promis la vice présidence de la République. Ce n'était pas écrit, mais le Gabon est une maison de verre.

Après plusieurs mois de patience, ne voyant rien arriver, le papa a retardé la dissolution de son parti. Vous l'avez encouragé à sauter le pas. Pour quel résultat ? En lieu et place de la vice présidence de la République, vous le dégagez de la tête d'une institution constitutionnelle, s'il vous plaît, où il était son propre patron, parce que vous voulez y caser bientôt un de vos protégés, pour une direction générale du contrôle des prix érigée en ministère ? J'imagine le choc ressenti par le Grand René, la fatigue sévère n'étant pas loin et l'amertume de ses partisans néo-pdgistes devenus qui se sentent, excusez du peu, "roulés dans la farine" !

Un os à ronger

J'entends aussi les plaintes d'un autre rallié, de l'Ogooue-Maritime celui-là qui, faute d'avoir vainement attendu un os à ronger, a décidé de suspendre sa participation au PDG, dénonçant, dit-il, le mépris et la marginalisation.

C'est toujours le même scénario : à la veille de chaque échéance cruciale, le Pouvoir déploie des trésors de séduction à l'égard des opposants et, une fois l'enjeu éloigné, ces derniers sont virés sans ménagement, condamnés à une mort politique et morale certaine. 

Que sont devenus les opposants qui, saisissant de bonne foi et naïvement, la "main tendue" avaient intégré les différents gouvernements dits "d'ouverture" ? Ils ont expérimenté, à leur grand détriment le manque de parole de leurs interlocuteurs.

Il paraît tout de même paradoxal et consternant que les responsables de ce Pouvoir, qui appartiennent pourtant, c'est de notoriété publique, à différents cercles initiatiques, ésotériques ou traditionnels, puissent indéfiniment se complaire du peu de cas qu'ils accordent à la sacralité de la PAROLE DONNEE !  

C'est le lieu de rappeler aux autres opposants qui seraient eux aussi tentés par le Grand Saut que ce Pouvoir, à la rancune tenace, est cyniquement ingrat, même à l'égard de ses propres partisans et soutiens, surtout lorsque dans votre ancienne posture, vous l'avez voué aux hégémonies.

Jean Valentin Leyama (ancien député de Moanda). 

  • Les intertitres sont de la Rédaction
Article du 13 janvier 2023 - 10:53am
Article vu "en cours dév"

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