Pierre Mamboundou : La sublimation de l’ordre juste

Par Brandy MAMBOUNDOU / 27 déc 2021 / 0 commentaire(s)

Jean De Dieu Moukagni-Iwangou ! L’homme n’est plus à présenter. Magistrat hors hiérarchie, cet originaire de Mouila est un excellent tribun. L’homme, opposant radical à l’époque, nommé le 04 mai 2018, à la surprise générale, ministre d’Etat en charge de l’Enseignement supérieur dans le gouvernement dirigé par feu Issoze Ngondet, a été limogé sept mois plus tard. Et cela, après avoir perdu les élections législatives à Mouila. Dans la tribune libre, ci-après, l’un des héritiers du président de l’Union du peuple gabonais parle de Pierre Mamboundou. Sans user (sic !) de la parabole pour faire passer « d’autres messages », l’ancien membre du gouvernement ne parle que de…Pierre Mamboundou. Lecture !

« En cette année qui conclut la première décennie du rappel de Pierre Mamboundou à Dieu, et qui va conduire ses héritiers à porter sur les fonts baptismaux la Fondation éponyme, j’ai le profond sentiment de travailler d’un cœur léger à la sublimation de l’ordre juste ».

Concept de gauche, articulé pour la dernière fois par Ségolène Royal, l’ordre juste a été abondamment chahuté, jusqu’à ce que l’on découvre, que les grands anciens l’évoquaient déjà.

"Jean Jaurès en parlait quand il appelait à en finir avec l'injustice qui, du père au fils, passe avec le sang. François Mitterrand pour qui le premier scandale était dans l'injustice fauteuse de désordre, suivait la même voie." 

L’idée a fait ensuite le tour du monde.

Dans sa résolution finale, de septembre 1996, le 20e congrès de l'Internationale socialiste, réuni à New York, a appelé de ses vœux à « l'apparition d'un ordre mondial juste et paisible ».  

Une autorité morale, Benoît XVI pour ne pas la nommer, y est allée de son couplet, en disant que « l'ordre juste de la société et de l'État est le devoir essentiel du politique ».

Consacrée dans le marbre de la loi, la Constitution de la Confédération helvétique entend « tout entreprendre, avec l'aide de Dieu, (...) pour créer un ordre juste pour le bien de tous ».

En questionnant les grands clercs, sur une définition du droit, on est édifié par la bataille qui oppose les juristes et les anthropologues.

Pour Christian Larroumet " Le droit est un corps de règles ordonnant la vie en société de façon à éviter l’anarchie entre les membres du corps social. "

Gérard Cornu, dans son Vocabulaire juridique y voit un " Ensemble de règles de conduite socialement édictées et sanctionnées, qui s’imposent aux membres de la société. "

Boris Stark, dans son introduction au droit, parle d’un " ensemble des règles de conduite qui gouvernent les rapports entre les hommes et dont le respect est assuré par l’autorité publique. ".

Or, la sanction n’est pas inhérente à la règle de droit dans notre système juridique.

Comme l’écrivent Alex Weill et François Terré : " … Une règle n’est pas juridique parce qu’elle est sanctionnée d’une certaine manière par le groupe ; elle est sanctionnée de cette manière par le groupe parce qu’elle est juridique.

C’est pourquoi, me rapprochant des précurseurs de la théorie du droit naturel, le droit doit être la mise aux normes des évidences, et, pour avoir observé les courbes de la philosophie de Pierre Mamboundou, j’incline à penser qu’il plaidait et s’est battu, toute sa vie durant, pour l’ordre juste.

Dans sa définition la plus large, la loi est l’expression de la volonté du Peuple, exprimée par lui-même, ou par ses représentants.

Traduite comme telle, la loi représente l’ordre public, qui protège la société.

Henri Lacordaire a démontré à cet effet, « qu’entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit ». 

Mais au jeu d’appareils, qui fonctionnent à la discipline des partis, la loi n’est parfois que l’expression de la confrontation entre la majorité parlementaire, qui domine et en impose absolument, et la minorité parlementaire, qui doit plier et reculer systématiquement, quel qu’intelligible que soit sa position.

Enfermée dans un abus de majorité, la majorité écrase par sa position dominante, une opposition qui repousse toute construction utile, parce que retranchée dans un abus de minorité, tout aussi détestable.

Lorsqu’elle ne regarde pas au bonheur du Peuple, mais à la puissance des puissants, la loi devient oppressante. Dès lors, elle légitime le droit à la résistance. Au nom de l’ordre juste.

Pour rappeler notre histoire, le monde a connu l’apartheid, qui le disputait au 3e Reich, dans la déshumanisation de la personne.

L’apartheid et le 3e Reich étaient tous enchâssés dans des lois.

Des institutions responsables, mises en place sous la férule de l’oppression, appliquaient avec zèle, chacune de leurs dispositions.

Des magistrats, tatillons et rigoureux, sanctionnaient les écarts à l’ordre public qui étaient signalés.

Pourvoyeuses de la peur et de la terreur, l’apartheid et le 3ème Reich ne faisaient pas autorité, parce que toute leur codification ne relevait pas de l’ordre juste. 

A l’examen de deux œuvres, qui illustrent parmi tant d’autres toute sa vie, Pierre Mamboundou a œuvré résolument à l’exaltation de l’ordre juste.

Prenons le cas de la création de l’Union du Peuple Gabonais (UPG), qui s’est constituée contre l’ordre constitutionnel de l’époque.

A parler vrai, la création de l’Union du Peuple Gabonais était une œuvre subversive, contraire au droit en vigueur, et passible de peines afflictives et infamantes.

Mais à parler juste, cette création, qui portait en elle l’expression d’un régicide, n’a pas opéré, parce que la doxa dominante avait déjà fait le deuil du Parti unique dans les esprits, et incliné les cœurs au rythme et à la cadence du pluralisme.

La conférence nationale, quoique non souveraine, n’a été que le récital de cette évidence.

Pour en venir à la loi sur la protection des données à caractères personnels, l’observateur saura témoigner, que les mérites d’une loi résident dans son application, et plus encore, dans la diligence qu’on y met à l’appliquer.

Ayant compris que les bonnes idées viennent de tout le monde, et même de la minorité parlementaire, la loi sur la protection des données à caractères personnels est la manifestation de ce que, bien inspiré, par la force des arguments, et non par l’argument de la force, on peut conquérir toutes les âmes, et faire avancer le pays.

La Fondation Pierre Mamboundou entend suivre ce chemin de lumière, emprunté très tôt par le Maître.

Jean De Dieu Moukagni-Iwangou (Président de l’US, ancien membre de l’UPG) 

 

Article du 27 décembre 2021 - 11:33pm
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