Relations France – Afrique : Emmanuel Macron non réformiste, ni inventif, exaspère les Africains

Par Brandy MAMBOUNDOU / 23 nov 2021 / 0 commentaire(s)
En soutenant les dictateurs africains, Marcon fâche les partisans du changement en Afrique.

Alors que les Africains s’attendaient à l’implémentation des valeurs françaises sur le continent noir, à la suite de son arrivée au pouvoir, le plus jeune chef d’Etat de la France, depuis trois décennies, évolue à contresens de cet ardent souhait. Son chef de la diplomatie, Jean-Yves Le Drian incarne malheureusement cette tendance. Conséquence, la haine « anti-classe politique au pouvoir en France » dans ses anciennes colonies est particulièrement manifeste ces dernières années.

Ce mardi 23 novembre 2021, sur RFI, invité par le journaliste Christophe Boisbouvier, l'essayiste Thomas Deltombe - l'un des auteurs de l’ouvrage « L'Empire qui ne veut pas mourir », publié aux éditions du Seuil - soutient ni plus ni moins que « la Françafrique n’a cessé d’évoluer au fur et à mesure des décennies et que (…) ses reformes n’avaient pas pour but de le faire disparaître, mais au contraire pour le moderniser, pour le faire perdurer ». Voilà qui est dit !

Aussi, pour le constat sur le terrain, les pays du Sahel sont la pierre d’achoppement d’une contestation anti-française ces dernières années. En effet, si les populations des pays francophones (anciennes colonies françaises et belges) ne semblent plus supporter la présence de la France officielle et non des citoyens Français sur leurs territoires respectifs, les causes sont à rechercher dans la diplomatie menée par l’ancien colon. Les populations rejettent énergiquement la qualité de la coopération entre la France et leurs pays.

Si, pour les pays du Sahel, la présence de l’armée française dans la bande sahélo-saharienne, qui était de prime abord la lutte contre le terrorisme et les djihadistes, cette coopération militaire est aujourd’hui très houspillée par une population qui accuse ouvertement une connivence entre la France et l’ennemi querellé. Celle-ci ne comprend point cette politique de coopération militaire qui accentue chaque jour un peu plus l’insécurité dans cette région. Le cas, ces derniers temps de plusieurs dizaines de morts parmi les gendarmes du Burkina-Faso et les attaques régulières dans la zone des trois frontières (Burkina-Faso, Mali et Niger). Certains habitants de cette zone n’hésitent plus à pointer du doigt une complicité française avec les terroristes. Et pour cause, depuis l’arrivée de l’armée française dans la bande sahélo-saharienne, les morts se comptent mensuellement par centaines, ce qui n’était pas le cas avant.

Une certaine méfiance

Depuis près d’un semestre, les manifestations anti-françaises s’accentuent et montent constamment en puissance dans ces pays menacés par un ennemi dont personne n’arrive à appréhender les moyens et la force de frappe sur une population désarmée. Si les Maliens avaient salué, à haute et intelligible voix, l’intervention française dans leur pays, ils ont vite déchanté lorsque les soldats français se sont opposés à l’arrivée de l’armée malienne dans la région de Kidal. Un comble pour une armée qui a vocation à être présente sur toute l’étendue du territoire. A partir de ce moment, une certaine méfiance s’est installée entre l’armée locale et celle appelée en renfort. Le massacre des soldats maliens lors de la visite officielle du Premier

ministre du président Ibrahim, Boubacar Keïta, en 2014, où la rébellion touarègue avait massacré les soldats qui avaient constitué l’escorte officielle du Premier Boubou Cissé. La France avait été accusée d’avoir brouillé la communication des militaires maliens, permettant du coup aux rebelles de faire un massacre de près d’une demi-centaine d’éléments dans les rangs de l’armée malienne. Une pilule qui est restée à travers la gorge des Maliens.

Avec les deux coups d’Etat simultanés intervenus au pays de Modibo Keïta contre Ibrahim Boubacar Keïta et le président intérimaire Bah Ndao, la France s’est trouvée coupée de ses relations françaises à Bamako. Ce qui a eu pour conséquence certains remous du côté de Paris. La population malienne a vite découvert le jeu trouble de la France, qui serait plus un ennemi qu’un allié. « L’ami de mon ennemi étant mon ennemi », l’évidence est donc patente. La suite, on la connaît. Les autorités maliennes, sous la pression de la rue, ont choisi de faire appel à d’autres partenaires pour la sécurisation de leur territoire. Notamment les Russes qui, dit-on en passant, sont tout, sauf des enfants de cœur.

Le fauteuil présidentiel de Marc Roch Christian

De fil en aiguille, ces mêmes protestations sont reprises au Niger et au Burkina Faso. Le blocus érigé par les populations burkinabé face aux à un convoi de l’armée française, à Kaya, dans le centre du pays, n’est que l’interface d’une volonté populaire de bouter l’armée française hors des frontières du « pays des hommes intègres ». Le fauteuil présidentiel de Marc Roch Christian Kaboré serait même menacé par le peuple, si les pouvoirs publics ne coupent pas leurs liens avec le néo-colonialisme français.

En Afrique centrale, les suspicions des populations ont pour origine le jeu flou dans certaines opérations militaires françaises. Au Cameroun, la secte Boko Haram serait épaulée par des Français. Même si cette critique n’est point avérée, plusieurs témoins ont déclaré avoir aperçu des militaires français dans les rangs de cette secte, qui a fait plusieurs morts au Nigeria, au Tchad et au Cameroun. Et l’on ne comprendrait comment une seule secte africaine, sous-armée, peut dominer plus d’une armée régulière (Cameroun, Nigeria et Tchad). Cette même secte a tenté, à un moment, de faire irruption au Bénin et au Niger. L’insécurité est aujourd’hui sur tous les fronts en Afrique de l’ouest et centrale.

En plus de cette crise de confiance qui s’installe dans les pays francophones, le procès fait à la France serait sans doute l’aide que celle-ci apporte aux dictateurs africains, régulièrement armés par les autorités de Paris et à visage découvert. Il n’est plus un secret pour personne qu’en Afrique francophone, les élections présidentielles ne sont plus qu’une formalité. Malgré la défaite des présidents dans les urnes, l’armée française implantée dans ces pays veille à ce que ses dictateurs ne soient jamais inquiétés. Conséquence, la rupture est aujourd’hui évidente entre l’Hexagone et les populations africaines. Et le président français, dont le discours jugé d’ordurier et d’impérialiste ne fait rien pour améliorer cette descente aux enfers de l’ancien colon. Son ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, se prenant pour un super chef d’Etat en Afrique, ne se soucie guère des préoccupations de la population africaine. Sa seule obsession étant la protection des intérêts français par le maintien des chefs d’Etat, leurs hommes-liges, dont les populations voudraient à tout prix se débarrasser, et au plus vite. L’espérance de vie de la présence française en Afrique, plus particulièrement en Afrique francophone, se réduit donc progressivement.

Nicolas NDONG ESSONO

Article du 23 novembre 2021 - 2:07pm
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