[TRIBUNE LIBRE] « Le Gabon au-dessus de tout : appel à un sursaut patriotique et républicain »

Par Brandy MAMBOUNDOU / 23 sep 2024 / 0 commentaire(s)

 

A travers le constat ci-après, notre compatriote Hugues Mbadinga Madiya, ancien ministre sous le règne d’Ali Bongo Ondimba, embouche la trompette de la gravité du moment en mettant chaque fille et chaque fils de ce pays devant ses responsabilités. « La transition, alerte-t-il les militaires au pouvoir, ne doit être ni partisane, ni réactionnaire. Elle ne doit viser qu’un seul objectif : le progrès. Le CTRI n’est pas un parti politique. C’est un organe d’exception dans une période d’exception. Son mode d’action étant la réflexion, le dialogue et l’inclusivité ». 

Pour cet originaire de l’Ogooué-Lolo, « en tant que Nation, nous ne devons pas échouer. Échouer serait une manière de condamner notre pays à l’instabilité et à la régression ». D’autant plus que les Gabonais ont majoritairement adhéré à l’acte posé par les militaires le 30 août dernier. « Je me rappelle, écrit cet acteur politique du PDG, encore de cette image forte d’une jeune fille gabonaise en larmes, murmurant aux oreilles du président de la Transition ; cela montre que le pays tout entier a choisi son camp. C’est le camp de la restauration des institutions, de la restauration de la dignité du peuple et de sa souveraineté ». Voilà qui est dit. Lecture !

Depuis le 30 août 2023, notre pays connaît des moments exceptionnels voire inédits avec la prise de pouvoir par les militaires rassemblés au sein du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI), et la dissolution des institutions qui s’est ensuivie.

Il faut dire que ce changement exceptionnel de régime s’est traduit par une adhésion populaire et massive, au point où il a été qualifié de « Coup de libération ». Depuis lors, le Général Brice Clotaire Oligui Nguema a été porté, conformément à la Charte de la transition, à la tête du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI). Il a prêté serment et exerce en qualité de président de la Transition, président de la République, chef de l’État.

Nous pouvons observer que le CTRI et le Gouvernement, appuyés par les autres institutions de la Transition, travaillent activement au retour progressif du Gabon à l’ordre constitutionnel.

Au plan économique, un programme de développement de la transition a également été conçu et mis en œuvre. Nous pouvons remarquer que plusieurs chantiers, nouveaux ou anciens, sont exécutés partout dans le pays, et un certain nombre d’entre eux sont livrés.

Sur le plan politique, le président Brice Clotaire Oligui Nguema a proposé aux Gabonais un Dialogue national inclusif (DNI) pour faire des propositions, en vue de redessiner l’architecture institutionnelle et socio-économique du nouveau Gabon. Il a aussi effectué des tournées à l’intérieur du pays pour prendre langue avec ses compatriotes et présenter la vision du CTRI.

Au plan international, notre pays, d’abord suspendu, a ensuite été réintégré au sein de la CEEAC. Les perspectives sont d’ailleurs optimistes pour que le Gabon réintègre l’Union africaine.

C’est dire que le Gabon vit aujourd’hui au rythme de la transition conduite par le CTRI. D’abord adulés de tous, le CTRI et son président, le Général Brice Clotaire Oligui Nguéma, font, toutefois actuellement, face à de vives polémiques alimentées principalement par les conclusions du Dialogue national inclusif. Pour une partie des Gabonais, certaines mesures issues de ce Dialogue seraient injustes et porteuses de divisions dans le corps social. D’autres voix s’élèvent pour condamner certaines actions du CTRI, notamment en termes de gouvernance politique et économique.

L’ampleur, voire la nature des critiques, interpelle et inquiète

Ces différentes expressions d’opinions sont normales puisque, même dans le cadre du régime de la Transition, le Gabon reste un pays démocratique. La Charte de la transition s’est formellement engagée à maintenir les libertés. Il reste que l’ampleur, voire la nature des critiques, interpelle et inquiète.

Ainsi, en tant que citoyen gabonais, il m’a paru nécessaire de m’exprimer pour donner mon point de vue sur la situation actuelle. C’est une question de responsabilité car, le pays appartient à tous et c’est ensemble, chacun à son niveau, qu’il nous revient de participer à l’édification d’un Gabon nouveau que les compatriotes appellent de leurs vœux.

Il est important de considérer, dans un premier temps, que l’occurrence d’un coup d’État dans un pays est un acte d’une gravité particulière, qui traduit une crise institutionnelle profonde. Nous avons, de ce point de vue, en tant qu’acteurs politiques de tous les bords, tous échoué. Même si les militaires, qui ont pris le pouvoir, se sont échinés à leur actif, à mettre en place des institutions de la Transition, nous ne devons pas perdre de vue que nous sommes actuellement dans un régime de transition dans lequel l’ordre constitutionnel, connu et établi souverainement, a été remis en cause. Il est vrai que, à l’inverse de certains pays, nous pouvons noter qu’il y a eu une adhésion populaire à l’action des militaires, au point où on peut considérer que nous avons eu affaire à un coup d’État aux assises populaires. Mais cela ne doit pas nous faire oublier la gravité de ces actions et la nécessité pour la classe politique de se remettre en cause, et de se mettre dans une démarche d’accompagnement des structures actuelles vers le rétablissement de l’ordre constitutionnel et la nécessaire reconstruction de notre pays.

Œuvrer pour la construction de ce nouveau Gabon que nous souhaitons

Le temps de la transition devrait être pour tous, un temps de réflexion, un temps de travail, un temps pour les réformes. Et nous devons louer, en cela, la démarche inclusive du président Brice Clotaire Oligui Nguema, qui s’est entouré de tous les Gabonais, jeunes comme anciens, issus de toutes les tendances politiques. Nous pouvons penser qu’en faisant ainsi, il a voulu amener l’ensemble des compatriotes à œuvrer pour la construction de ce nouveau Gabon que nous souhaitons, un Gabon plus démocratique, un Gabon plus souverain, un Gabon plus juste, un Gabon qui s’occupe mieux de ses populations.

La Transition ne doit être ni partisane, ni réactionnaire. Elle ne doit viser qu’un seul objectif : le progrès. Le CTRI n’est pas un parti politique. C’est un organe d’exception dans une période d’exception. Son mode d’action étant la réflexion, le dialogue et l’inclusivité.

J’appelle, ainsi, l’ensemble des responsables politiques à se remettre en cause dans ces temps particuliers. J’appelle l’ensemble des forces politiques à la raison et à la responsabilité. L’heure n’est pas à la politique politicienne, ou aux simples calculs politiques de positionnement. Notre pays a connu d’importantes divisions, des déchirements à plusieurs niveaux. Il est temps de nous réunir et de rebâtir.

En tant que Nation, nous ne devons pas échouer. Échouer serait une manière de condamner notre pays à l’instabilité et à la régression. Échouer c’est reporter vers nos enfants, des problèmes que nous n’aurions pas été capables de résoudre, alors même qu’ils étaient à notre portée. Nous avons fait trop de politique dans ce pays. Nous devons concentrer nos efforts à la réussite de cette transition. Ceci implique de renoncer, un temps, à nos calculs personnels et travailler ensemble à la mise en place d’institutions crédibles et démocratiques, l’élaboration d’une nouvelle constitution acceptée par la majorité de la population.

Aucun point de vue ne doit être négligé

Bien entendu, le CTRI et son président doivent garantir une certaine transparence dans leur mode d’action. Le président de la Transition est le chef de l’Etat et c’est le garant de ce processus. Il doit demeurer à l’écoute de ses compatriotes, comme il l’a fait depuis le début. Aucun point de vue  ne doit être négligé. Je pense particulièrement à la jeunesse et aux femmes. Nous devons continuer à capitaliser les progrès accomplis, car il y en a eu, bien qu’insuffisants, et corriger ce qui n’a pas marché.

La clameur populaire qui a suivi le 30 août traduit l’espoir suscité au sein du peuple gabonais par l’avènement du CTRI. Nous pouvons y voir toute la responsabilité du président de la Transition et de ses compagnons face à cet immense espoir suscité au sein de la population. Cela doit rappeler à tous que le coup d’Etat du 30 août n’est pas un coup contre ou pour le PDG et les autres partis politiques, mais plutôt contre l’instabilité qui aurait prévalu après la proclamation des résultats de la dernière élection. En réalité, et je l’ai exprimé dans mon dernier ouvrage sur l’avenir du PDG, lorsque des militaires sortent de leurs casernes pour interrompre un processus électoral, c’est que la classe politique, toute la classe politique, a échoué. Aujourd’hui, l’élection présidentielle 2023 est derrière nous. Il faut maintenant aller de l’avant. Je me rappelle encore de cette image forte d’une jeune fille gabonaise en larmes, murmurant aux oreilles du président de la Transition ; cela montre que le pays tout entier a choisi son camp. C’est le camp de la restauration des institutions, de la restauration de la dignité du peuple et de sa souveraineté. Le coup du 30 août est un coup pour le Gabon. Pas un coup contre le PDG ou en faveur des responsables du PDG ; pas un coup en faveur des ex-dirigeants du PDG devenus opposants ou des partis de l’ex-opposition qui, comme par magie, seraient tout d’un coup absous de leur responsabilité face au recul progressif des acquis sociaux et à la détérioration du bien-être des populations depuis plus de 30 ans. 

La politique politicienne c’est une bonne chose car, elle témoigne de la vitalité démocratique d’un pays, mais l’avenir du peuple et son bien-être c’est encore mieux. C’est pourquoi, j’invite le CTRI à œuvrer encore plus fort pour mettre le pays sur les rails de la modernité, avec des institutions fortes, un système démocratique qui protège les intérêts de la population, contre toutes sortes de lobbys intérieurs et extérieurs, la paix et le vivre-ensemble, la justice et la souveraineté économique. 

Hughes Mbadinga Madiya (Ancien ministre, économiste, acteur politique, membre du Parti démocratique gabonais)

Article du 23 septembre 2024 - 11:36am
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