Gabon : La privatisation de la SNBG fait hurler les députés

Par Brandy MAMBOUNDOU / 23 mai 2024 / 0 commentaire(s)

 

Rendues publiques le 15 mars dernier, les conclusions de l’enquête mettent en lumière une privatisation faite hors des règles.

Après le coup de libération de l’armée gabonaise, intervenu le 30 août 2023, les nouvelles autorités du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) avaient, sans ambiguïté, laissé entendre qu’elles étaient décidées à reconquérir notre souveraineté économique.

En présentant les vœux à la Nation le 31 décembre 2023, le président de la Transition, Brice Clotaire Oligui Nguema en avait d’ailleurs donné le ton. Joignant l’acte à la parole, il fit exercer les droits de préemption pour le rachat de la société pétrolière Assala Gabon. C’était le 15 février 2024. Et ce n’est qu’un début dans la reprise totale du secteur pétrolier.

La reconquête se poursuit donc dans un autre secteur tout aussi vital pour le Gabon : le secteur bois. Ici, l’Etat gabonais, comme s’il avait été poussé dehors par le régime déchu et ses amis étrangers dont l’Ecossais Lee White, est totalement absent. Pour avoir le cœur net, l’Assemblée nationale de la transition a décidé, en décembre 2023, de mettre en place une Commission d’enquête parlementaire sur la situation de la Société nationale des bois du Gabon (SNBG).

Possibilité de contrôler l’exploitation du bois

Créée par Ordonnance n°62/75 du 4 octobre 1975 sous la forme d’un établissement public à caractère industriel et commercial, la SNBG a une importance capitale et historique dans la filière forêts-bois. L’Etat, qui y détenait 51 % parts, contre 43 % pour les forestiers et 6% pour les salariés, avait donc la possibilité de contrôler l’exploitation du bois, la gestion des forêts et d’aider les petits exploitants gabonais, pour la plupart.

Toutefois, les résultats de l’enquête parlementaire, dirigée par Ali Eyegue, montrent que c’est ce même Etat qui a mis en grande difficulté sa propre société, en cassant son monopole par la mise en place, en 2001, d’un nouveau Code forestier qui privilégie « l’aménagement durable des forêts, prévoit un système de quotas de production et fixe un objectif de 75 % à atteindre pour la transformation de la production locale du bois à l’horizon 2011. »

Mais avant cette échéance, Ali Bongo, une fois au pouvoir, décide en 2009 de l’interdiction d’exportation du bois en grumes. Or, c’était la principale activité de la SNBG, qui va tomber comme un fruit mûr, malgré la construction très tardive d’un complexe industriel qui aura coûté 45.5 milliards de francs CFA. Et c’est GSEZ qui va en profiter, pour verser un franc symbolique, d’un million, pour acheter « le cadavre » SNBG.

Anticiper les décisions de l’Etat

Les enquêteurs pointent aussi un doigt accusateur sur l’immobilisme des différents responsables qui se sont succédé à la tête de la SNBG ; lesquels n’ont pas su anticiper les décisions de l’Etat. Ils ont continué à dormir dans le confort, malgré les alertes du commissaire aux comptes Deloitte.

Pour toutes ces raisons et bien d’autres, les enquêteurs estiment que « l’opération de privatisation de la SNBG n’a pas respecté le processus légal et réglementaire ». Leur conclusion tombe drue : « Bien que continuant à exister sur le plan juridique, la SNBG est aujourd’hui une coquille vide qui ne rapporte rien à l’Etat, puisque bénéficiant de toutes les exonérations possibles et dont l’ensemble des actifs a été mis en location par Gabon special economic zone (GSEZ) à son profit exclusif. Mieux, la participation de l’Etat dans le capital de GSEZ au travers de la Caisse de dépôts et consignation (38.5 %) ne lui rapporte aucun revenu 10 ans après… »

Il appartient donc à l’Etat, au gouvernement qui détient le rapport des députés, de diligenter les enquêtes nécessaires pour confondre tous ceux qui ont géré cette société, mais surtout de récupérer l’argent qui devait revenir à l’Etat sous forme de taxes et autres.

Elzo Mvoula

Article du 23 mai 2024 - 10:19pm
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