Par la voix du responsable du bureau Afrique, Arnaud Froger, Reporters sans frontières (RSF) proteste contre la suspension, sans préavis, des sites d'information Corbeau News et le Tsunami par le ministre des Postes et Télécommunications centrafricain le 16 février 2021, peu après la réélection contestée du président FaustinArchange Touadéra.

« Cette sanction contribue à affaiblir un peu plus là couverture médiatique déjà rendue très difficile par le contexte sécuritaire très instable en République Centrafricaine, un pays en guerre où les médias sont souvent otages des intérêts et forces en présence. RSF exige le rétablissement immédiat de l'accès à ces deux sites et demande aux autorités de laisser les médias et journalistes exercer librement leur métier », déclare Arnaud Froger.

A travers une note, le ministre ordonnait aux opérateurs internet de bloquer l'accès à ces sites « jusqu'à nouvel ordre ». Il accuse les deux médias de diffuser des « propos haineux » et de fausses informations dans un contexte de « crise sanitaire », sans pour autant préciser de quelle publication il s'agit exactement. Les responsables des médias n'avaient été ni consultés ni informés de cette décision. Le président du Haut conseil de la communication assure n'avoir pas été mis au courant de l'information, la République Centrafricaine (RCA) étant dans une période trouble avec des violences depuis décembre 2020.

Alain Nzillo, le directeur de publication de Corbeau News, affirme que cette décision vise à empêcher son site de divulguer des informations sensibles sur la présence des paramilitaires russes de la société Wagner en Centrafrique, ce que dément le gouvernement. Il déclare également avoir été invité à modifier sa ligne éditoriale par les forces russes et avoir subi des menaces par un haut responsable de l'armée centrafricaine.

Le directeur du site Le Tsunami soutient, lui aussi, l'hypothèse selon laquelle son média a été suspendu après la publication de plusieurs articles dénonçant des « crimes de guerre » commis par les mercenaires russes de la société Wagner.

Quant à la Russie, par l'intermédiaire de son ambassadeur, Vladimir Titorenko, elle a démenti en mars, dans un entretien accordé à radio Bangui FM, la présence de mercenaires russes sur le territoire centrafricain et accusé les médias financés par l'opposition armée de propager de fausses informations. Cependant, le 31 mars 2021, un reportage publié par le groupe d'experts des Nations unies sur les mercenaires alertait pourtant sur les « graves violations des droits de l'homme » que commettraient les paramilitaires russes en RCA.

Brandy MAMBOUNDOU