Complexité politique à Libreville : Trois coups d’Etat en 17 minutes

Par Brandy MAMBOUNDOU / 04 sep 2023 / 0 commentaire(s)
Le 30 août 2023, un coup d'Etat qui a libéré le peuple.

On ne le croirait pas. Pourtant, ce 30 août 2023, au petit matin, le général Oligui, commandant de la Garde républicaine, venait de réaliser l’exploit d’un tir pour cibles, comme on dirait « trois en un ». Le tout pour propulser le Gabon dans une histoire s’inscrivant encore en pointillé, mais dont la liesse populaire dénote l’espoir contenu dans cet acte.

Trois en un. Assurément, il fallait être fort. Comme tout le monde l’a vu, tout est allé très vite le 30 août 2023. Stéphane Bonda, chef d’orchestre du Centre gabonais des élections (CGE), croyant avoir réalisé une parfaite mise en scène d’un détestable théâtre, a lu à… 4h du matin, les résultats de la Présidentielle. Il donnait Ali Bongo vainqueur de cette élection inédite, avec 64% du suffrage qui se serait exprimé en faveur du candidat du Parti démocratique gabonais (PDG). 

Premier coup d’Etat. Samedi 26 août, Albert Ondo Ossa, candidat de la puissante plateforme Alternance 2023, fait une déclaration devant plusieurs médias. En substance, il dit avoir gagné l’élection et accorde à Ali Bongo deux jours pour négocier sa sortie et transmettre pacifiquement le pouvoir. Mais le PDGiste ne l’entend pas de cette oreille, puisque ses sbires du CGE le déclarent vainqueur. C’est le premier coup d’Etat, qui est un coup d’Etat électoral. L’opposition et le peuple gabonais considèrent que leur victoire vient d’être volée, et le spectre de 2016 rejaillit. Tout le monde tombe dans le traumatisme et la torpeur. 

Deuxième coup d’Etat. Ali Bongo se frotte les mains dans sa maison de la Sablière. Il croit que le tour est joué et que l’histoire de 2016 va se reproduire en 2023. Il est content pendant 17 minutes. Lorsqu’Ali Bongo et les PDGistes jubilent, Albert Ondo Ossa et les siens pleurent. Ils viennent de recevoir un coup de massue. Mais, coup de théâtre ! Sur les écrans où venait de disparaître Stéphane Bonda, apparaissent maintenant des hommes en treillis, qui déclarent avoir pris le pouvoir en déposant Ali Bongo Ondimba. C’est un coup d’Etat militaire cette fois-ci contre le président réélu à sa propre succession. Les militaires rejettent les résultats de l’élection, considérant que les fraudes et le désordre n’ont pas permis de rendre compte de la volonté des électeurs. Ali Bongo et les PDGistes pleurent. Mais Albert Ondo Ossa et les siens peuvent-ils rire ?

Troisième coup d’Etat. Alternance 2023 croyait avoir gagné la présidentielle et se préparait à gouverner. Mais Ali Bongo et les siens se sont mis en travers de la route d’Ondo Ossa, lui barrant la voie menant au Palais du bord de mer. Ce qu’il n’avait pas vu venir, c’est le coup d’Etat sur un coup d’Etat, puisque l’armée qui fait tomber Ali Bongo fait aussi tomber Albert Ondo Ossa. Oligui et ses hommes, en annonçant leur coup et en envisageant la Transition pour la restauration des institutions, prive Ondo Ossa d’une bataille postélectorale où il rêvait de finir sur le fauteuil présidentiel. 

En 17 mn, tout s’est accéléré et tout a basculé. Tout s’est fait la nuit, à 4h du matin. Une succession de coups d’Etat où disparaît le projet d’alternance et où prend forme une transition gérée par les militaires.

Si Ondo Ossa n’a pas pris le pouvoir, Ali Bongo n’a pas survécu aux 48h qui lui ont été accordées par le candidat d’Alternance 2023. Mais à qui ce jeu profite-t-il ? Là est toute la question.

Elzo Mvoula

Article du 4 septembre 2023 - 10:30pm
Article vu "en cours dév"

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