Gabon : Perplexe gesticulation de Bilie-By-Nze

Par Brandy MAMBOUNDOU / 19 aoû 2021 / 0 commentaire(s)
Alain Claude Bilie-By-Nze.

Comme s’il savait son départ du gouvernement imminent, ce très haut cadre du PDG devenu -après un passage dans plusieurs partis de l’opposition - fait flèche de tout bois pour attirer l’attention sur lui. Signe des temps, en moins d’une semaine, il a publié deux posts sur les réseaux sociaux dont les contenus parlent d’eux-mêmes…

Alain Claude Bilie-By-Nze n’est pas n’importe qui. Il ne fait pas n’importe quoi. Ses actes sont toujours mûrement calculés, reconnaissent à la fois ses proches et ses nombreux adversaires. De famille modeste, mais solidement accroché à l’obsession d’être incontournable au Gabon, l’enfant terrible de Ntang Louli (Ogooué -Ivindo) a gravi les échelons à la force de son poignet et grâce à son instinct. Il s’est donc construit de lui-même. Même si, peu instruit et encore plus, très peu éduqué, parfait prototype du mercenaire politique – à César ce qui est à César, personne au Gabon ne peut l’égaler sur le plan du mercenariat politique - il mélange souvent le bagou et l’esbrouffe qu’il croit faire passer pour de l’instruction. Mais bon…

C’est cet homme-là, ministre d’Etat de la République, qui, depuis quelques temps s’illustre par des posts sur les réseaux sociaux qui sortent de l’ordinaire. Et surtout, dans un environnement où chaque mot, chaque phrase… est scruté dans tous les sens. Lui, Alain Claude Bilie-By-Nze dit ce qu’il pense comme il veut. Ainsi, en ce qui concerne le retour auprès d’Ali Bongo Ondimba de Jean Eyeghe Ndong, ACBBN le voit d’un mauvais œil. « Il y a de la clameur dans le ciel, écrit-il sur son compte twitter, lorsqu’un enfant revient dans la maison du Père. Saluons donc le retour de toutes ces personnalités, mais n’oublions pas de lire ou de relire le Cheval de Troie ».

A travers ces écrits, il s’adresse exclusivement à ses camarades du Parti démocratique gabonais (PDG) et à leur distingué camarade, président du parti, par ailleurs chef de l’Etat, auxquels il recommande la lecture d’un mythe grec qu’ils ne connaissent pas manifestement. Les Grecs ont vaincu les Troyens au moyen d’une astuce. Ils auraient construit un grand cheval en bois pour l’offrir aux Troyens en guise de paix. Mais le cheval dissimulait des soldats grecs qui, arrivés à Troie dans le cheval, ont massacré les soldats troyens. Troie a donc perdu la guerre.

Pour Bilie-By-Nze, les enfants qui reviennent à la maison du père seraient des chevaux de Troie. S’est-il regardé dans le miroir pour qu’il dessine lui-même le chemin qu’il a parcouru pour parvenir au PDG ? Membre du Rassemblement national des bûcherons (RNB), puis du Rassemblement pour le Gabon (RPG), il a repris le Rassemblement pour la démocratie et le progrès (RDP) d’Alexandre Samba, qu’il a quitté bruyamment pour rejoindre le PDG. Si ceux qui reviennent à la maison du père sont dangereux, a-t-il été donc dangereux pour le père, lui qui est revenu de si loin ?

En poussant le questionnement plus loin, faut-il soupçonner Bilie-By-Nze de préparer une candidature à la présidentielle contre celui qu’il considère comme « le père », Ali Bongo Ondimba ? D’autant plus que dans un deuxième post, daté du 17 août dernier, l’originaire de l’Ogooué Ivindo, en reprenant les propos de Bryan Ward-Perkins, un historien britannique, parle de l’histoire des « Romains », avant la chute de Rome, qui « étaient sûrs (…) que leur monde durerait toujours sans de grandes mutations ». Alain Claude Bilie-By-Nze, qui ne fait rien par hasard, s’adresse-t-il courageusement à Ali Bongo Ondimba ? Dans tous les cas, les oreilles exercées ont compris. Il ne serait donc pas étonnant que, dans peu de temps, ACBBN revienne dans l’opposition et se positionne pour 2023. 

Le vrai cheval de Troie

Au reste, Bilie-By-Nze a beau montrer qu’il est un peu cultivé, contrairement à ses camarades PDGistes, il fausse la lecture des évènements par des proximités métaphoriques erronées, au regard de l’histoire du Gabon. Il est de notoriété publique que le régime Bongo-PDG espionne ses adversaires, et que c’est lui seul qui a les moyens de payer des espions et de les infiltrer dans le camp de ses adversaires.

La rumeur publique raconte même que René Ndemezo’Obiang a fait la prison dans son histoire politique seulement pour espionner ceux qu’Omar Bongo considérait comme des adversaires.

Plus près de nous, l’on raconte également que le même René Ndemezo’Obiang a espionné Jean Ping au profit d’Ali Bongo dont il aurait été le cheval de Troie en 2016.

Le mercato politique en cours est sans doute le résultat du travail des chevaux de Troie envoyés en masse par le régime Bongo-PDG à ses opposants. Ceux qui vont au PDG ne sont pas des chevaux de Troie.

La vérité est que Bilie-By-Nze a peur du rassemblement autour d’Ali Bongo car, il le sait, il y a peu à manger pour tout le monde. Ali Bongo devra récompenser ceux qui ont signé la réconciliation ou qui ont trahi Jean Ping. Ces récompenses menacent parallèlement les privilégiés comme ACBBN. De fait, son propos ne vise qu’à se protéger des menaces des nouveaux venus.

L’apaisement

On pourrait croire que le mercato politique en cours sert les intérêts de la Nation. Non seulement la nation n’est pas assimilable au régime, comme veulent nous le faire croire Ali Bongo, Moukagni-Iwangou et Jean Eyeghe Ndong, mais en plus, ce n’est pas dans le recrutement des personnels de l’opposition qu’Ali Bongo ramènera la paix et la sérénité dont il a parlé lors de son allocution du 16 août.

En prenant individuellement René Ndemezo’o, Féfé Onanga, Frédéric Massavala, Jean Eyeghe Ndong, et il y eut bien d’autres, le régime ne construit pas l’unité des fils du pays. La preuve, après que Jean Eyeghe Ndong a claqué la porte à Jean Ping, les opposants ont-ils désormais un accès libre aux médias publics ? Les victimes de la crise post-électorale de 2016 ont-ils été indemnisées ? Les exilés politiques sont-ils rentrés au pays ? Les Gabonais mangent-ils à leur faim ? L’administration est-elle devenue républicaine ? Alphonse Louma Eyougha peut-il devenir ministre de la Santé ? François Ondo Edou peut-il être nommé ministre de la Communication ?...Où donc est l’apaisement ?

Ce serait plutôt en organisant un dialogue ouvert à toute la classe politique, sans aucun cheval de Troie, que l’unité nationale peut être conservée. Or, les PDGistes ont peur d’une grande messe qui rassemble toutes les obédiences politiques sur une même table de discussion. Et pourtant, c’est l’unique voie du salut pour tous.

Elzo MVOULA

Article du 19 août 2021 - 3:27pm
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