Vigoureusement chahuté par deux membres de la diaspora gabonaise venus de Paris, alors qu’il assistait à la 33ème session extraordinaire du Crans Montana Forum Africa à Bruxelles, le porte-parole du gouvernement y voit une main invisible des responsables du régime en place, donc vraisemblablement un signe d’une lutte de positionnement pour la succession du chef de l’Etat actuel pour laquelle le député de Ntang Louli n’a jamais fait mystère.

D’abord les faits. Nous sommes le 1er juillet dernier en Belgique, précisément à Bruxelles où se tient la 33ème session extraordinaire du Crans Montana Forum Africa. Alors que Bilie-By- Nze est à la tribune, des individus qui viennent de faire brusquement irruption dans la salle scandent des propos hostiles au régime d’Ali Bongo. Florilège : « Ces messieurs détournent l’argent tous les jours » ; « Libérez tous les prisonniers politiques au Gabon » ; « Il n’y a pas de droits de l’homme au Gabon » ; « Les gens sont massacrés tous les jours » ; « Tous les morts qu’il y a au Gabon, tu n’as pas honte » …

La famille politique de l’ex indic mise en cause

À première vue, au regard de la tonalité des propos, il s’agirait des membres de la diaspora gabonaise en France hostiles à Ali Bongo. Pas du tout selon le ministre gabonais de l’Énergie ! Car de retour au Gabon, Alain Claude Bilie-By-Nze est allé immédiatement chez nos confrères d’Urban Fm, au cours de l’émission le Dafrechmorning, dans l’intention de révéler les dessous de cette affaire que le commun des Gabonais jugeait pourtant très claire.

À en croire celui qui revendique « 32 ans passés dans la politique » - notamment comme indic des autorités contre les membres de l’opposition, lorsqu’il était un agitateur médiocre de ce camp avant 2006 – cette opération est l’œuvre des personnalités de sa propre famille politique actuelle, entendez le PDG. « Je ne crois pas, a dit Bilie-By-Nze, que cela vienne de l’opposition. Nous avons été en France où il y a la plus grande diaspora qui manifeste contre le régime, il ne s’est rien passé (…) Nous savons aujourd’hui que certains individus en ont fait un fonds de commerce, alimenté par certains d’entre nous au Gabon. Je sais qui a fait ça, mais je ne vous dirai pas qui ».

Pour le porte-parole du gouvernement, les deux individus partis de Paris bénéficient forcément d’un sponsor (ou des sponsors) tapis dans l’ombre du pouvoir, qui ont financé leurs titres de transport et leur hébergement en Belgique. Il en est d’autant plus persuadé que « ça fait 32 ans » qu’il fait « de la politique » - de délation, de diversion et de subversion. Autrement dit, « si au bout de 32 ans on est encore surpris par des évènements de cette nature, c’est qu’on n’a rien compris de la politique ». Un chef de la Cosa Nostra de Palerme n’aurait pas mieux défini le métier noble de la politique !

Des « envies présidentielles » à vite neutraliser

Dès lors, les supputations ne manquent pas. Pour bon nombre de Gabonais, « les évènements de Bruxelles » ne sont rien d’autre que l’illustration de la guerre de succession qui se joue désormais autour d’Ali Bongo. Une réalité confirmée par Bilie-By-Nze lui-même, dauphin autoproclamé en coulisses dont on soupçonne les velléités présidentielles. D’autant plus que la gouvernance chaotique du Gabon actuellement montrerait qu’Ali Bongo ne maîtrise plus rien. Du coup, chaque potentiel candidat pousse ses pions et tente d’étouffer ses probables concurrents.

Selon nos informations, mise en éveil et consciente des « envies présidentielles » de Bilie-By-Nze, la « Young Team » aurait confié une mission de « neutralisation » de l’imprévisible ministre d’État à Michael Moussa Adamou, à l’époque ministre de la Défense nationale, aujourd’hui aux Affaires étrangères. Or, au lieu de cela, cet obsédé de l’argent facile et du business, comme tout bon commerçant haoussa qui se respecte, s’est plutôt contenté de l’affairisme en oubliant d’investir le terrain politique dans l’Ogooué-Ivindo. Ainsi, c’est un secret de polichinelle, bon nombre de chefs d’État-major des forces de sécurité se plaignaient de la boulimie « de ce ministre de la Défense qui sabre les budgets des différents corps ».

Comme si cela ne suffisait pas, devenu promoteur immobilier prospère, il utilisa les services du génie militaire pour les travaux de terrassement de ses parcelles acquises à plus de 180 millions les 1000 mètres carrés, payés rubis sur l’ongle s’il vous plaît ! Au cap Esterias il est devenu propriétaire d’un vaste domaine incluant un élevage de zébus et de vastes plantations à perte de vue. Un ranch à l’image du célèbre feuilleton Dallas des années 1980. Où a-t-il trouvé tout cet argent pour de tels investissements colossaux ?

Michael Moussa ou Franck Nguéma ?

Comme quoi, Michael Moussa Adamou, accessoirement ambassadeur du Gabon aux Etats-Unis dont il gère encore les budgets, n’est mû que par l’argent et non l’investissement politique dans l’Ivindo. Parallèlement, Alain Claude Bilie-By-Nze, qui par effet de boomerang, subit aujourd’hui ses exploits d’hier, peut continuer allègrement à remettre au goût du jour la guerre de succession autour d’Ali Bongo. Même s’il refuse de dévoiler les auteurs de cette tentative d’humiliation publique, on peut déjà exclure Rose Christiane Ossouka Raponda, incapable de tuer une mouche. Manifestement et avec une probabilité élevée, Franck Nguema, l’un des bras armés de la Young Team, pourrait être l’homme par qui sont venus les malheurs de l’enfant terrible de Ntang Louli. Le neveu de Mba Obame, qui nourrit du mépris pour Bilie-By-Nze, va-t-il réussir là où Moussa Adamou a échoué, c’est-à-dire mettre hors d’état de nuire le ministre de l’Énergie ? L’avenir proche nous le dira. Pendant ce temps, l’opposition politique ainsi que la majorité silencieuse pédégiste comptent les coups !        

Dess Bombe