La méditation de pleine conscience serait aussi efficace que les antidépresseurs
Un essai clinique visant à comparer les effets d’un antidépresseur courant à ceux d’une thérapie de réduction du stress basée sur la méditation de pleine conscience a révélé que les deux approches pouvaient être aussi efficaces l’une que l’autre pour réduire les troubles anxieux. Un espoir pour les patients qui ne répondent pas (ou mal) aux traitements médicamenteux, ou qui ne peuvent y accéder comme le révèle un article publié le 12 janvier dernier sur le site www.scienceetvie.com.
La méditation de pleine conscience, quels bienfaits ?
Les troubles anxieux, qui se caractérisent par une anxiété intense et durable, sont fréquents au sein de la population. Selon l’Inserm, 21 % des adultes seraient concernés au cours de leur vie. Les femmes sont deux fois plus concernées que les hommes. Ces troubles peuvent prendre différentes formes (anxiété généralisée, trouble panique, agoraphobie, etc.). Ils s’exprimer par un large éventail de symptômes psychologiques et physiques. On trouve notamment l’irritabilité, la peur irrationnelle, les difficultés de concentration, l’incapacité à faire des projets, les troubles digestifs, les insomnie, les vertiges, etc.. Non seulement les troubles anxieux impactent fortement la vie quotidienne, mais ils augmentent le risque de suicide et d’invalidité.
La méditation de pleine conscience : se focaliser sur le moment présent pour soulager l’anxiété
On recommande généralement une thérapie cognitivo-comportementale et/ou un traitement médicamenteux (à base d’anxiolytiques ou d’antidépresseurs). Mais de nombreux patients peinent à obtenir ces médicaments ou ne supportent pas les effets secondaires (nausées, dysfonctionnement sexuel, somnolence, etc.). Un essai clinique a récemment mis en évidence le potentiel curatif d’une autre approche. Il s’agit de la méditation de pleine conscience (ou mindfulness en anglais). C’est une pratique qui consiste à focaliser son attention sur le moment présent. On s’intéresse à ce qui se passe en soi et autour de soi, sans le moindre jugement.
Des thérapies basées sur la pleine conscience sont déjà mises en pratique de manière sporadique. Cependant, on n’avait jamais évalué leur efficacité relative (par rapport aux médicaments habituels). Pour combler ce manque, des chercheurs du Georgetown University Medical Center ont recruté 276 patients, âgés de 33 ans en moyenne, souffrant de troubles anxieux dans trois hôpitaux de Boston, New York et Washington. Ils les ont assignés au hasard à une thérapie de réduction du stress. Elle se basait soit sur la pleine conscience (MBSR) soit sur l’escitalopram. C’est un antidépresseur inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine, couramment prescrit pour traiter la dépression et l’anxiété.
L’essai a duré huit semaines. La MBSR consistait en 45 minutes d’exercices quotidiens qu’on devait réaliser à domicile. Il y avait également un cours de 2h30 « en présentiel » chaque semaine, ainsi qu’une journée de « retraite » réalisée à la cinquième ou sixième semaine. Le groupe sous antidépresseur a reçu des doses quotidiennes de 10 à 20 mg d’escitalopram.
Les chercheurs ont évalué les symptômes d’anxiété des participants à leur inscription, puis à l’issue des huit semaines. Ils ont également réalisé des évaluations de suivi à 12 et 24 semaines après l’inscription.
Une baisse de 30 % de la gravité des troubles
Sur les 276 patients recrutés, 208 sont arrivés au bout de l’essai (8 % des patients du groupe escitalopram ont abandonné pour cause d’effets indésirables). Les résultats, publiés en novembre dans la revue JAMA Psychiatry, révèlent que les symptômes d’anxiété ont diminué chez les patients
des deux groupes. Au départ, sur une échelle de 1 à 7 (7 étant associé à une anxiété sévère), la gravité des symptômes était en moyenne de 4,5 pour les deux groupes. Les chercheurs rapportent une réduction moyenne de 1,35 point pour le groupe MBSR et de 1,43 point pour l’escitalopram. Des résultats qu’on considère comme statistiquement équivalents.
En d’autres termes, les deux approches ont entraîné une baisse significative d’environ 30 % de la gravité des troubles anxieux des patients. La MBSR apparaît donc tout à fait légitime pour traiter l’anxiété. De ce fait, elle devrait être prise en charge de la même manière que les traitements traditionnels.
« Notre étude fournit des preuves pour que les cliniciens, les assureurs et les systèmes de soins de santé recommandent, incluent et assurent le remboursement de la réduction du stress basée sur la pleine conscience en tant que traitement efficace des troubles anxieux. En effet, la méditation de pleine conscience est actuellement remboursée par très peu de prestataires », explique Elizabeth Hoge. Elle est directrice du programme de recherche sur les troubles anxieux, professeure associée de psychiatrie à Georgetown et première auteure de l’étude.
« Une fois que vous avez conscience d’une réaction anxieuse, vous pouvez choisir comment la gérer. Ce n’est pas un remède magique, mais c’est une sorte d’entraînement qui dure toute la vie. Au lieu que mon anxiété progresse, elle est allée dans l’autre sens, et j’en suis très reconnaissante». C’est ce que témoigne une patiente qui pratique la MBSR depuis plusieurs années maintenant, après avoir participé à une étude antérieure sur cette thérapie.
Une approche qui demande plus d’efforts
La méditation de pleine conscience présente plusieurs avantages. Tout d’abord, elle est exempte d’effets secondaires indésirables (contrairement aux médicaments). En outre, on peut la pratiquer quasiment n’importe où et à n’importe quel moment (dès que le patient en ressent le besoin). La pratique est par ailleurs aujourd’hui aisément accessible via de nombreuses applications pour smartphone, même pour les non initiés. « L’un des grands avantages de la méditation de pleine conscience est qu’elle ne nécessite pas de diplôme clinique pour former quelqu’un à devenir un animateur de la pleine conscience. De plus, on peut effectuer les séances en dehors d’un cadre médical », ajoute le Dr Hoge.
Cependant, comme le souligne la spécialiste, la pratique nécessite un investissement personnel important. « Tout le monde n’est pas disposé à investir du temps et fournir des efforts pour réussir toutes les séances nécessaires et s’exercer régulièrement à domicile, ce qui améliore l’effet », précise-t-elle.
Les apps de méditation ou autres interventions par vidéoconférence peuvent être intéressantes. Cependant, la chercheuse reste sceptique quant à l’efficacité de ces exercices peut-être un peu trop individuels. Pour un maximum d’efficacité, il est essentiel, selon elle, de conserver des moments d’échange direct avec l’animateur et les autres pratiquants.
À noter que l’essai clinique a pris fin avant le début de la pandémie de COVID-19. Les chercheurs ont toutefois mené une deuxième phase de l’étude pendant la pandémie. Elle consistait justement à proposer la MBSR par vidéoconférence. Ceci fera l’objet d’analyses futures. L’équipe envisage également d’explorer les effets de la MBSR sur le sommeil et la dépression.
Dess Bombe
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